Journal of the International Law Department of the University of Miskolc |
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Vol. 5. (2008) No. 2. pp. 1-15. |
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Blaise Tchikaya* :
Le droit international
et le concept de minorité
Quels sont les principes de droit international applicables mutatis mutandis aux minorités nationales dans le continent africain ? La réponse à la question est complexe. Cette complexité tient en grande partie à la transposition mécanique et systématique ([2]) dont est l’objet le concept de minorité. En effet, le concept a fait fortune en droit des gens. Dès le début du XXème siècle, il a mis en difficulté, l’arrogance unificatrice qu’a toujours eue l’institution principale du droit international : l’Etat. C’est d’ailleurs en ce sens que, l’Afrique offre un cadre de vérification des affirmations sur ce concept. L’un des derniers avatars politiques en Afrique, la crise comorienne, en est saisissant. L’analyse, sur ce point, n’est pas aisée. Car, la lecture courante ne s’y attarde pas. Les Comores renferment pourtant un noyau récessif : les revendications minoritaires mal réglées ([3]). A la différence des autres concepts de droits de l’homme, celui-ci est très ancien et traverse l’histoire politique des sociétés européennes ([4]). Le constat d’échec dressé sur ce sujet contre la défunte Société des Nations (SDN) entre 1914 et 1938 n’a pas épuisé l’intérêt international de la notion. Il a été immédiatement mis en discussion à partir de 1945 dans le cadre du droit des Nations-Unies qui y consacre un organe ad hoc : la sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de protection des minorités. Cette appellation ne change qu’en 1999([5]). Bipoun-Woum (Joseph-Marie) avait surpris la doctrine en affirmant qu’ « en Afrique, c’est plutôt l’Etat, entant que société politique, qui est minoritaire »([6]). Cette déclaration, qui doit être actualisée, n’est pas fausse lorsqu’on considère que ces Etats, issus de récente composition étrangère, sont constitués de mosaïque d’ethnies. L’Etat est souvent dépourvu assise politique. Au point où, sans évoquer le « serpent de mer » que constitue l’unification nationale, l’Etat est dans une « tension permanente »([7]) entre les diverses communautés. Comme en Europe ([8]), cette question est au cœur des débats passionnés de l’histoire contemporaine et de la science politique africaines. L’Afrique s’en préoccupe au cours de l’ensemble du XXème siècle, en particulier, dès que la communauté internationale a commencé à s’émouvoir des communautés noires d’Afrique du Sud. Les controverses, sur ses grands traits, sont consignées dans le lourd dossier du droit international relatif à l’Apartheid en l’Afrique du Sud. Ce dossier a donné lieu au célèbre Avis de la Cour internationale de justice, Conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie nonobstant la Résolution 276 du Conseil de sécurité rendu le 21 juin 1971 ([9]). Le jeu des rapports entre le signifiant et le signifié est d’importance. Comme pour conjurer une réalité à peine supportable, les négociations internationales africaines feignent d’ignorer le fait minoritaire. C’est ce que l’éminent Professeur Hart redoutait du savoir juridique : « The first handicap of human rule-maker who wishes to regulate conduct unambiguously and in advance is our relative ignorance of fact »([10]). L’identification du fait juridique, objet objectif, est donc fondamentale et devrait primer. Afin d’avoir une prise de décision plus réaliste, en 2000, la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des peuples née de la Charte du même nom, qui vient de percevoir la difficulté, adopte une Résolution([11]) sur les droits des peuples et les communautés indigènes en Afrique en vue de créer un groupe de travail sur les droits des communautés indigènes ou ethniques en Afrique avec pour mandat d’examiner le concept de peuples et communautés indigènes.
On connaît la classification globale des minorités du professeur Stavenhagen. Il pense que les minorités peuvent être constituées soit : — par des groupes religieux (Sikhs, Musulmans, Parsis, en Inde), nationaux (ancienne URSS), raciaux, linguistiques, vivant dans des Etats se reconnaissant comme multinationaux ou pluriethniques ; — par les mêmes groupes vivant dans un Etat-nation ne reconnaissant pas le fait minoritaire; — par des minorités nationales détachées d'un Etat voisin de celui dont ils sont les ressortissants, l’exemple de certains groupes du Congo, de Burundi, du Rwanda; — par des minorités ethniques à cheval sur des frontières, le cas typique étant celui des Kurdes divisés entre l'Iraq, l'Iran, la Syrie, la Turquie. On pourrait ajouter disait-il celui des Touaregs divisés entre le Mali, le Niger, le Burkina Faso, l'Algérie, la Mauritanie; — par les peuples indigènes (Pygmées du Congo, du Gabon…) ([12]). Si le langage politique utilise le concept de minorité nationale, le droit africain n’en discerne que très peu le contenu et l’acception, sous réserve des droits fondamentaux reconnus aux groupes humains. Ainsi, il y a un paradoxe lié au fait que malgré la diversité des communautés dans ce continent, le droit africain ne fait qu’une place restreinte au concept de minorité (I). Ensuite, il conviendra d’évoquer le poids l’impératif de l’unité de l’Etat sur cet état du droit (II).
Un paradoxe : la place restreinte en Afrique du concept de minoritéLe droit international en Afrique, depuis les années 50, se refuse d’utiliser le concept de minorité. Il y est pourtant question de communautés et de tribus. Ceci est un paradoxe au regard des tensions entre les groupes et au regard de la situation politique des Etats. Une nouvelle rhétorique s’est mise en place à travers les textes internationaux que résume l’usage abondant du concept de peuple. En effet, l’approche s’effectue par prétérition. Une tendance à traiter d’un phénomène sans le dire, sans avoir à le déclarer. Comme pour bien des concepts politiques, cette situation semble liée aux difficultés de transposition d’une notion déjà consacrée par la réalité politique européenne. Toutefois, cette position peut être mise en relation avec celle de la France selon laquelle : « Dans les États où il existe des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques, les personnes appartenant à ces minorités ne peuvent être privées du droit d'avoir, en commun avec les autres membres de leur groupe, leur propre vie culturelle, de professer et de pratiquer leur propre religion, ou d'employer leur propre langue » ([13]). Cette réserve bien connue de la France à la Convention de 1966, tendrait a dire que lorsque les droits sont reconnus, peu importe l’existence statutaire du sujet. Et que, toute construction juridique autour du statut des minorités est superflue. Or, la réalité politique, entre les Etats d’Afrique et la France, est à ce point différente que ce rapprochement est bien hasardeux.
A. La construction difficile du concept de minoritéA Addis-Abeba (Ethiopie), le 25 mai 1963, lorsque qu’est rédigée la Charte de l’organisation de l’Unité africaine, le concept de minorité nationale est inconnu. On semble déjà lui préférer celui de peuple » ([14]). Les « peuples ont le droit inaliénable de déterminer leur propre destin » ([15]) formule le Préambule. Une idée qui traduit insuffisamment et très mal celle aujourd’hui discutée de minorité. L’Acte constitutif de l’Union africaine (11 juillet 2000) n’en est pas éloigné, car il s’agit de « relever les défis multiformes auxquels sont confrontés notre continent et nos peuples… ». Formulation assez proche des revendications des peuples minoritaires. Le concept internationaliste de « minorités » rend très peu compte des groupes ethniques, linguistiques et culturels marginalisés en Afrique. A deux niveaux : - comme concept d’identification des groupes et, - comme concept d’évocation des problèmes et stratégies spécifiques des peuples d’Afrique en situation de rupture politique. En 1966, le Rapporteur spécial pour les Nations Unies, Francesco Capotorti ([16]), a proposé la définition suivante dans le contexte de l’Article 27 de la Convention internationale sur les droits civils et politiques: « Un groupe numériquement inférieur au reste de la population d’un Etat, en position non dominante, dont les membres – ressortissants de l’Etat – possèdent du point de vue ethnique, religieux ou linguistique des caractéristiques qui diffèrent de celles du reste de la population et manifestent même de façon implicite un sentiment de solidarité, à l’effet de préserver leur culture, leurs traditions, leur religion ou leur langue »[17]. Cette définition a été développée en 1985 par Jules Deschênes, là encore à la demande de la Sous-Commission des Nations Unies: « Un groupe de citoyens d’un Etat, en minorité numérique et en position non dominante dans cet Etat, dotés de caractéristiques ethniques, religieuses ou linguistiques différentes de celles de la majorité de la population, solidaires les uns des autres, animés, fût-ce implicitement, d’une volonté collective de survie et visant à l’égalité en fait et en droit avec la majorité ». Sans doute, dans d’autres espaces politiques également, l’idée de numériquement inférieure ne semble pas exacte, ainsi que cette étude le montrera, pour l’Afrique. Cette recherche sur le concept est une quête du « graal » torpillée par le refus des Etats de voir leur souveraineté limitée et d’être confronté à des revendications sécessionnistes. Par sous-entendu, l’article premier de la Convention-Cadre du 1er février 1995 (entrée en vigueur en 1998) dit simplement que : « La protection des minorités nationales et des droits et libertés des personnes appartenant à ces minorités fait partie intégrante de la protection internationale des droits de l’homme et, comme telle, constitue un domaine de la coopération internationale ». Il faut comprendre que les minorités nationales sont des minorités de personnes à protéger par la coopération internationale… La résonance politique du concept en Afrique est pourtant très forte. Le fait colonial a marqué d’une empreinte profonde la composition des groupes et des communautés. L’Angola, y compris son appendice le Cabinda, le Mozambique, l’Afrique du Sud-ouest (aujourd’hui Namibie), la Rhodésie (aujourd’hui Zimbabwe) et l’Afrique du Sud sous l’apartheid ont été des Etats gouvernés par une minorité de formation coloniale. Cela mettait au grand jour diverses crises démocratiques. Les critères élaborés au niveau international ne rendent pas forcément compte de la complexité des Etats multiethniques d’Afrique. Se sont des Etats diversifiés en terme d’ethnicité, de religion, de langues, et comprenant parfois plus de 250 groupes ethniques, comme, par exemple, au Nigeria ou au Cameroun. La recommandation 1201 (1993) du Conseil de l'Europe portant proposition d'un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, qui définit sans doute pour la première fois le concept de minorité concernant les personnes appartenant à des minorités nationales, a adopté dans le texte du projet de protocole additionnel une définition d'un grand intérêt. Ce projet comprend un titre intitulé: «Définition.». L'article premier, compris sous ce titre, note : « Aux fins de cette convention, l'expression minorité nationale désigne un groupe de personnes dans un Etat qui : a) résident sur le territoire de cet Etat et en sont citoyens, b) entretiennent des liens anciens, solides et durables avec cet Etat, c) présentent des caractéristiques ethniques, culturelles, religieuses ou linguistiques spécifiques, d) sont suffisamment représentatives tout en étant moins nombreuses que le reste de la population de cet Etat ou d’une région de cet Etat, e) sont animées de la volonté de préserver ensemble ce qui fait leur identité commune, notamment leur culture, leurs traditions, leur religion ou leur langue ». Les qualités de cette définition sont indéniables, mais on retiendra que ces groupes minoritaires, en quête d’identité ou reconnaissance, sont appréciés comme étant en relation simplement avec l’Etat sur le territoire duquel ils vivent. Or, dans le cas de l’Afrique, ces groupes exercent souvent l’autorité politique. Les droits des minorités, ainsi que leur évocation, n’étaient pas dans le projet de Banjul portant en 1981 protection des droits fondamentaux. La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples l’attention est portée sur la préservation et la protection des droits des Etats tout en consacrant celles des droits de l’homme : intégrité territoriale et inviolabilité des frontières. Aussi, cette Charte en fait elle l’impasse…Les intentions des rédacteurs n’étaient pas non plus d’assimiler la notion de « peuple » à celle de minorité ou groupe ethnique. L’Union Africaine ne le prévoit pas dans son texte fondamental (11 juillet 2000) parmi ses objectifs relatifs à la promotion et la protection des droits humains et des peuples conformément à la Charte Africaine de dispositions sur les minorités. L’Union africaine (UA) ignore le concept de minorité. C’est la Commission africaine([18]) qui s’y engage et, dans une politique jurisprudentielle audacieuse, étend le concept de peuple à celui de minorité. Cela confère une signification plus élargie au concept. Les minorités semblent ainsi sortir de l’oubli. La Commission considère la notion de « peuples » comme s’appliquant aux communautés ethniques ([19]). En réalité, les Constitutions africaines se gardent bien toutes de prévoit des conditions discriminatoires contre des groupes des communautés, même si la pratique politique pourrait être différente. Ce qui a donné lieu à une des jurisprudences importantes de la Commission africaine. L’article 11 de la Constitution de la Zambie, par exemple, disposait qu’ « il ne doit y avoir aucune discrimination reposant sur «la race, le lieu d’origine, les opinions politiques, la couleur, la croyance, le sexe ou la situation matrimoniale … ». Enfin, à l’exception notable de la Cour internationale de la Haye qui aborda la question de front ([20]), il faut souligner que c’est à des concepts ou à des mécanismes généraux que l’on a souvent recours lorsqu’il s’agit des droits des minorités. C’est ce qui résulte de la politique jurisprudentielle actuelle du contentieux africain en application de la Charte africaine. Ce que fit également la Cour européenne des droits de l’homme saisi dans le contentieux de Chypre contre la Turquie, avant sa doctrine ne s’éclaircisse en 2008 ([21]). Elle a assimilé les discriminations ethniques à des « traitements inhumains et dégradants »([22]). La Commission africaine interprétant l’article 2 sur les droits fondamentaux individuels ([23]) y a trouvé un moyen juridique à la lutte contre les discriminations dont serait victime un peuple. Cela montre que la méthode en la matière n’est pas stricte. Que le pouvoir juridictionnel ou quasi-juridictionnel dispose d’une marge d’appréciation.
Les principaux textes internationaux pertinents
La Déclaration des Nations Unies (ONU) du 18 décembre 1992 sur les Droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques reprend les termes de l’article 27 de la Convention internationale sur les droits civils et politiques qui énonce que « Les minorités ethniques, religieuses ou linguistiques, les personnes appartenant à ces minorités ne peuvent être privées du droit d’avoir, en commun avec les autres membres de leur groupe, leur propre vie culturelle, de professer et de pratiquer leur propre religion, ou d’employer leur propre langue »([24]). Cette énonciation ne donne en réalité pas un contenu à la notion, mais se prononce sur les droits des personnes.
B. …Et, la notion de peuples autochtones ?La distinction entre le concept de minorités et celui de peuples autochtones n’est pas non plus facile ([25]). Lequel précède l’autre…Dans la mesure où du fait de la pénétration étrangère ces peuples d’Afrique ont été relégués. Ils ont cependant, en droit, « la capacité de se doter de pouvoirs politiques, législatifs et exécutifs quant à l’administration et à la formulation des lois ayant trait à la gestion du territoire et de ses ressources ». On suivra avec intérêt ce qui résultera de la création en 2007 d’un mécanisme d’Experts au Haut commissariat des Nations-Unies aux droits de l’homme spécialisés en matière de droits de peuples autochtones([26]). Mieux fixé sur l’un (peuple autochtone) on saura davantage le contenu de l’autre (peuple). La déclaration de l’Unesco de 2001 ne s’y est pas trompée en protégeant la cause culturelle des minorités en association avec celle des peuples autochtones. L’article 4 de la Déclaration énonce que : « La défense de la diversité culturelle est un impératif éthique, inséparable du respect de la dignité de la personne humaine. Elle implique l'engagement de respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales, en particulier les droits des personnes appartenant à des minorités et ceux des peuples autochtones. Nul ne peut invoquer la diversité culturelle pour porter atteinte aux droits de l'homme garantis par le droit international, ni pour en limiter la portée ». Les ethnocides dont sont menacées les minorités, existent également pour les peuples autochtones. Pour le Professeur Ben Achour, il n’y a pas de distinction fondamentale. Normalement di-il, « cette catégorie se ramène entièrement à celle de minorités ethniques. Elle ne présente pas de traits distinctifs substantiels »([27]). Cette notion de peuple autochtone est opérationnelle pour l’Afrique. La constitution de minorité étant souvent liée à la déstructuration coloniale. De même, les prises de pouvoir par des minorités y trouvent leur explication dans de nombreux cas : Afrique du Sud, Rwanda,…Ainsi, ce sont les groupes eux-mêmes, qui doivent s’auto-identifier à des minorités, qu’ils soient décrits comme nationalités, communautés’, ‘groupes ethniques’, ‘peuples’ ou ‘nations’ par les Etats. Si les peuples autochtones, au niveau international, ont souvent souligné qu’il était important de distinguer clairement les autochtones des minorités, et de ce fait, demandent un régime distinct en droit international, les peuples autochtones ou communautés ethniques ont une approche plus flexible dans le contexte africain. Les règles de droit international œuvrant à protéger et promouvoir les droits des peuples autochtones ont pour but de répondre et mettre fin aux formes particulières d’abus et violations dont ils sont souvent victimes. Soulignons toutefois que les minorités qui ne s’auto-identifient pas en tant que peuples autochtones peuvent avoir des revendications légitimes similaires s’agissant de leur lien à la terre et de leur désir d’autonomie. Sur cette question, l’attention des juristes fut attirée par les débats passionnants, et parfois houleux, qui ont précédé l’adoption au Conseil des droits de l’homme des Nations-Unies à Genève de la Déclaration sur les sur peuples autochtones du 30 juin 2006 ([28]). En réalité, les problèmes posés ont une similitude complète à ceux des minorités. Revendications de droits linguistiques, participations à la vie politique, droits fonciers, droits à une culture propre…etc. Revendications formulées de la même façon par les minorités. La similitude de l’attitude des Etats encore plus remarquable sur ces deux questions. Trois catégories peuvent être distinguées : D’un côté, ceux qui, peu nombreux acceptent effectivement de reconnaître les droits humains, politiques et sociaux qui reviennent aux autochtones et aux minorités ; de l’autre, ceux qui les acceptent en retenant certains de ces droits, en particulier politique ou sur les terres ; enfin, ceux, plus préoccupants, qui y mettent des obstacles. Dans ces deux dernières catégories peuvent s’insérer des Etats comme le Burundi, le Nigeria, le Kenya… et sans doute d’autres Etats en Afrique pas disposés à œuvrer pour les droits fondamentaux des minorités ou des peuples autochtones.
Un Etat unificateur integrant les minorités en afrique
Le droit international positif formule le principe comme une sujétion faite aux Etats démocratiques : les minorités ont des droits qui ne peuvent être ignorés, ni bafoués ([29]). La capacité de l’Etat à rendre effectif les droits collectifs et individuels est au premier plan. C'est dans le cadre de l'Etat que se situe la mobilisation des ressources, l'allégeance des esprits, l'accumulation des moyens de puissances, l'unité de direction politique disait Michel Virally ([30]). Or, on admet que c’est dans une volonté politique résolue qu’un groupe, constitué en minorité, acquiert des droits politiques et accède à l’exercice du pouvoir. L’Etat va, de ce fait être discuté dans sa constitution et dans ses choix relatifs aux populations. Les groupes, ballottés par les idéologies communautaires, peuvent mettre en difficultés, l’unité de l’Etat. Question qu’il faut aborder avant de mettre en évidence le choix effectué par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (1981), de définir les droits des minorités à travers ceux des peuples.
L’unité de l’Etat Principe constitutionnel moderne, l’unité de l’Etat est affirmée dans la quasi-totalité des constitutions en Afrique. A la fois pour affirmer, le cas échéant, le principe de l’Etat unitaire, ayant cours dans la plupart des Etats africains([31]), mais aussi pour constitutionnaliser celui de son indivisibilité ([32]). L’unité de l’Etat est aussi une condition nécessaire au fonctionnement de l’Etat et d’observation par celui-ci de ses engagements internationaux. Cependant, l’Etat doit reconnaître les droits des minorités ([33]). Ce que certains Etats en Afrique semblent assez peu intégrer est le fait que la reconnaissance des droits des minorités n’est pas contraire au bon fonctionnement de l’Etat. Au contraire, il permettrait un développement harmonieux des populations. La question des droits fondamentaux des minorités est liée au statut des personnes, à leurs droits, devoirs et obligations et non à l’exercice du pouvoir d’Etat. Le lien entre les deux n’est qu’indirect. Ce n’est qu’on ignorant les droits fondamentaux que l’exercice du pouvoir risque d’être remis en cause. Au final, la liberté que les Etats africains, devenus modernes, vont exercer à l’intérieur de leurs frontières est donc limitée, même dans ce domaine, par le droit international. A cette fin, a été adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU, la très significative Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques([34]) qui vise la promotion et la protection des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques afin que soit assuré leur stabilité politique et sociale ([35]). En Afrique, l’affermissement de l’Etat a été quelques fois considéré comme une résolution ou un accord sur les droits des minorités. Ce fut par exemple le cas dans la crise du Biafra ([36]), du Katanga ([37])... Les issues donnaient souvent à conclure que les droits de l’Etat seraient ceux des minorités alors assurés par l’Etat ([38]). Ce constat permet de comprendre que l’Etat en place confisque toujours les droits politiques en lâchant du leste sur les autres droits jugés moins dangereux : les droits culturels, la langue, et autres formes d’expression. Le droit à l’autodétermination restant confisqué ([39]). Le cas rwandais ([40]) illustre de façon quasi-caricaturale l’effet désastreux, des « idéologies » communautaristes et ethnicistes développées par la pénétration belge. Il montre le pas que ces idéologies peuvent prendre sur l’impératif de l’unité de l’Etat. Selon les historiens, à l’époque coloniale, les Hutus formaient 90% de la population et étaient en majorité des paysans. Les colonisateurs belges avait vu en eux une race inférieure. Les Tutsis qui constituaient une minorité détenaient le pouvoir du fait qu’ils étaient perçus comme une race supérieure.
Le droit des minorités garanti par les droits des peuples
Il résulte de la Charte africaine des droits des peuples que le concept de minorité a été ramené, en droit, à celui de peuples. Autrement dit, c’est par les droits reconnus aux peuples que les minorités défendront les leurs. Sur le sujet, la 43ème session de la Commission africaine des droits de l’homme qui se tient en 2008, n’apporte que confirmation à travers les situations critiques au Kenya, au Soudan, en Guinée, au Cameroun et en Somalie. L’explication se trouve dans la question de l’Etat et celle de sa formation historique. La façon dont l’objectif unitaire a été organisé en Afrique est un aspect de la problématique. Les droits politiques qui s’y rattachent sont impliqués ([41]). Il a été souligné le concept de minorité est politiquement revendicatif. Bien de pays, comme la France, la Grèce, la Bulgarie, la Turquie n'admettent pas l'existence de minorités nationales et ne se sentent pas concernés par le texte de Copenhague([42]). Cela pourrait s'expliquer pour la France dont la tendance historique séculaire est à la constitution d'un Etat-nation indivisible et intégrateur. Devenu l’originalité du système africain des droits de l’homme, le concept de peuple a dominé la construction de celui de minorité. La base juridique se trouve dans les articles 19 et 20 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples. On note déjà dans le Préambule que « les luttes héroïques menées par nos peuples et nos pays pour l'indépendance politique, la dignité humaine et l'émancipation économique ». Dans le même Préambule est affirmée « une identité commune et la réalisation de l'unité de notre continent, et a constitué un cadre unique pour notre action collective en Afrique et dans nos relations avec le reste du monde ». Le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies (CDH) a statué en tirant partie de l’Article 27 de la Convention internationale des droits civils et politiques, qu’un Etat partie ne peut réduire les droits prévus à l’Article 27 à ses seuls citoyens. Que « l’existence dans un Etat partie donné d’une minorité ethnique, religieuse ou linguistique ne doit être tributaire d’une décision de celui-ci, mais doit être établie à l’aide de critères objectifs ». Cette approche rejoint la Charte africaine qui fait de la reconnaissance des droits des peuples le point commun de convergence. Il revient aux minorités de se constituer et de ce reconnaître comme peules et, d’en bénéficier les droits. Le statut de minorité se fixe donc sur le principe d’auto-identification. Tout système en droit des Etats doit tendre à ce que les minorités aient le droit d’exister et être traitées sans discrimination, à la préservation de leur identité culturelle, et à leur participation à la vie publique. Ce que le Professeur Charles Chaumont appelait le droit de témoigner de soit même. On sait que pour l’Affaire du Sud-ouest africain, la Cour de la Haye s’était refusée de composer. Pour elle, la seule issue était le droit à l’autodétermination ([43]). Cette option est permanente.
En droit, l’existence des minorités oblige à préserver leurs identités et obtenir leur égalité politique et économique avec tous les autres groupes à l’intérieur de l’Etat. Les divers groupes en Afrique pourraient bénéficier de ce principe, par exemple: les Bakilayi et Karimajong en Ouganda; les Ijaw et Ogoni dans l’Etat de Rivers du Nigeria; les Wayeyi, Bakalaka et Bakgaladi au Botswana; les Herero en Angola; les Konkomba au Ghana; les Twa au Burundi; les Bakweri et Bagyeli au Cameroun; les Sengwer, Maasai et Ogiek au Kenya; les Haratin et Noirs africains en Mauritanie; les Afars à Djibouti; et les Khoisan (Sud-Afrique).
Sur ces droits, des parallèles pourraient être faites avec la situation de minorités en Europe centrale et orientale. Parmi, les droits qui furent très vite protégés figuraient le droit à la nationalité, le droit à l'usage de la langue maternelle, soit dans les relations privées ou de commerce, soit en matière de religion, de presse ou de publication de toute nature, le droit à l'enseignement dans la langue maternelle, le droit à la propriété privée, le droit à la sécurité contractuelle et, par-dessus tout, le droit au traitement égal avec les ressortissants majoritaires. Ce dernier droit entraînait l'interdiction de toute discrimination pour des motifs raciaux ou religieux. L’article 4 de l’Acte de l’Union africaine donne mandat d’intervenir en cas grave crise comme le génocide ou de crime contre l’humanité. Cette disposition semble avoir été dictée par le souvenir des évènements du Rwanda. Si l’on peut émettre des doutes sur sa mise en œuvre effective, son inscription reste toutefois lucide ([44]). Afin de donner un sens aux nouvelles options sociales de l’Union africaine qui tient pour « sacro-sainte la personne humaine » (article 4), l’article 23 énonce en son point 2 : « tout Etat membre qui ne se conformerait pas aux décisions et politiques de l’Union peut être frappé de sanctions notamment en matière de liens avec les autres Etats membres dans le domaine des transports et communications, et de toute autre mesure déterminée par la Conférence dans les domaines politique et économique ». Les Etats africains, réunis à Port-Louis (Ile Maurice), ont adopté le 5 juillet 1976 la Charte culturelle africaine qui reste un texte important dans ce domaine. L’article 3 indique que « les Etats africains reconnaissent la nécessité de tenir compte des spécificités nationales, la diversité culturelle étant facteur d'équilibre à l'intérieur de la nation et source d'enrichissement mutuel des différentes communautés ». La diversité culturelle revendication majeure des groupes minoritaires est donc, en droit au moins, protégée depuis l’entrée en vigueur de ce traité le 19 septembre 1990 ([45]). Par ailleurs, on peut noter que la Commission africaine a utilisé l’esprit de la Charte afin de donner un contenu concret la notion de minorité. Pour la Commission le champ conceptuel de la notion minorité rencontre celui de peuple. Il considère les minorités comme des peuples dont on doit préserver les droits fondamentaux. Dans une approche globale, le peuple désigne l’ensemble des citoyens d’un Etat. Comme le montre la célèbre Affaire du Timor oriental ([46]). L’exercice démocratique d’un peuple ne peut rester sans égard pour les droits des minorités. L’article 19 et 20 de la Charte africaine regroupe ces différentes hypothèses. Ce sont ces mêmes dispositions que la Commission africaine utilise pour sanctionner les discriminations dont sont victimes les négro-mauritaniens en Mauritanie et au Ghana, en particulier, l’article 19 : « Tous les peuples sont égaux; ils jouissent de la même dignité et ont les mêmes droits » et peu importe que ces discrimination résulte de l’Etat et non pas d’une ethnie sur une autre ([47]). Le fait discriminatoire à des fins politiques au détriment d’un groupe a été condamné par la Commission africaine. En examinant une plainte selon laquelle l’Etat défendeur aurait violé les dispositions des articles 2, 3 et 19 de la Charte Africaine en ce que la loi de 1996 portant modification de la Constitution de la Zambie était jugée discriminatoire. L’Article 34 dispose que « quiconque souhaite se porter candidat aux fonctions de Président de la Zambie doit prouver que ses deux parents sont citoyens zambiens par la naissance ou par la descendance ». Cet amendement a eu pour effet de priver un citoyen zambien, en l’occurrence l’ancien Président Dr Kenneth David Kaunda, du droit de prendre part aux élections. Il avait été régulièrement désigné par un parti politique légitime comme candidat à l’élection. On prétendait que cet amendement avait pour effet de priver quelque 35% de l’électorat de la Zambie du droit de se porter candidat à l’élection présidentielle lors de scrutins futurs pour la plus haute fonction du pays. La Commission tient l’occasion pour bonne. Il insiste dans cette affaire sur le fait que l’article 2 de la Charte Africaine prohibe la discrimination sur la base de n’importe lequel des motifs indiqués, notamment «la langue … l’origine nationale ou sociale… la naissance ou toute autre situation … ». Le droit à l’égalité, souligne t-il, est très important. Pour conclure que « toute mesure visant à exclure un groupe de citoyens d’une participation aux processus démocratiques », comme l’amendement en question a réussi à le faire, est discriminatoire et est en porte-à-faux avec la Charte africaine. Elle décide que : L’Etat Zambien est en violation des articles 2, 3 et 13 de la Charte africaine ([48]).
Par ailleurs, s’agissant d’un domaine qui reste un point d’encrage des évolutions récentes des sociétés africaines, en l’occurrence la question religieuse. La Commission a dû de la même façon tirer partie de l’article 17 de la Charte des droits de l’homme et des peuples sur la liberté de la vie culturelle pour le protéger en faveur des minorités. La pratique jurisprudentielle l’atteste, il existe bien des minorités en Afrique. Il faut donc « tordre le coup » à toute idée contraire. Point sur lequel, l’Afrique n’est pas originale. Le « leviathan » reste un monstre froid, il ne reconnaîtra pas l’existence des groupes minoritaires qui risquent de rompre son unité politique souvent fragile. Bien plus que l’absence de législateur, comme on a pu le croire ([49]), c’est le projet que porte les Etats qui est en cause ici. La question des minorités, est aussi complexe que l’est la politique aujourd’hui dans ce continent. La place des minorités est aussi restreinte que celle qui revient au droit qui pourrait aider à l’améliorer.
Deux observations pour finir cette analyse : 1) Au lieu de construire des idéaux et des objectifs, il conviendrait que le droit des relations intra-africaines renforce les moyens et les mécanismes permettant de les atteindre. Non qu’il ne faille pas renforcer les formulations des droits des minorités, mais il s’agit d’imaginer la mise en œuvre des droits. Des mécanismes semblables à celui de l’article 23 de l’Acte constitutif de l’Union africaine 2 : « tout Etat membre qui ne se conformerait pas aux décisions et politiques de l’Union peut être frappé de sanctions… ». Encore que celle pourrait aller plus loin dans la précision. 2) L’univers est celui du politique, comme le soulignait une des études du Professeur Marti Koskenniemi ([50]). Il n’y aura de protection internationale des droits de minorités évacuée de la sphère politique. Le droit des uns (les nantis) ne sera concédé aux autres (les minorités) par le biais des conventions négociées par les nantis. Ces conventions ne pourront qu’y aidé, mais elles ne feront que consacrer des aboutissements. Le défi du droit des minorités, « les Etats africains doivent avoir pour objectif de relever, car les conflits, les opportunités inégales, et le non-respect du droit des minorités au développement, créent le plus grand obstacle au développement durable du continent entier » (comme le dit Samia Slimane, Haut commissariat des Nations-Unies aux droits de l’homme). Le statut à conférer aux minorités est une question collective et, pour un tel objet, c’est l’Etat qui impulse. *Blaise Tchikaya est maître de conférences en droit public à la Faculté de droit et d’économie de la Martinique ([2]) La question des minorités ne relève qu’exceptionnellement du droit international. Elle fait donc normalement partie des «affaires intérieures» de l'Etat. Elle relève de la «compétence exclusive» ou de la «compétence nationale» de l'Etat. v. Oscar Schachter (Oscar), International Law in Theory and Practice», RCADI, tome 178 (1982-V), pp. 328-333. Rappelons toutefois que dans l’affaire jugée par l’Arbitre Unden, (S. A., Forêt de Rodhope central, Grèce contre Suede, 29 mars 1933, R.S.A., vol. III, p. 140). Il fut demandé à la Société des Nations, puis au juge arbitre, de se prononcer sur le sort des nombreux ressortissants grecs avaient été dépossédés par les autorités bulgares. ([3]) Le système politique de l’Ile Anjouan a été établi autour de la Grande Comores, morcelé entre douze sultanats sans cesse en conflit. Au XVIe siècle, les Portugais ont pris le contrôle des Comores. Au XVIIe siècle, les navigateurs européens, en route vers les Indes firent les escales aux Comores. Au XIXe siècle, des Malgaches s'établirent à Mohéli. Partout, des aventuriers européens accaparèrent une bonne part des terres, les exactions des planteurs provoquant des révoltes. Anjouan est en effet une île sous-développée et surpeuplée. Et elle est restée marquée par les événements qui ont scandé son histoire coloniale, avec des transferts massifs de propriété foncière au bénéfice des colons. Les paysans ont été dépossédés. Ce système quasi féodal s'est perpétué après l'indépendance, puisque les terres ont été rétrocédées aux riches citadins anjouanais. Les nantis citadins sont des descendants de populations d'origine swahilie ou shirazie, et méprisent ceux qu’ils appellent les « paysans nègres ». Une spoliation légale s’est donc installée. Vivant en situation de précarité, beaucoup de ces paysans ont été contraints au départ vers Mohéli ou la Grande Comore. v. notamment, Djamal M’sa Ali, Luttes de pouvoir aux Comores, Editions de la lune, Paris, 2006, 236 p. ([4]) Les remarquables études de Kovacs (P.), La protection internationale des minorités nationales aux alentours du millénaire, Ed. A. Pédone, Paris, 2005 ; Le droit international pour les minorités face à l’Etat-nation, P.U. Miskolc, 2000, 201 p. ; v. aussi Cours et travaux (N°5) de l’Université Panthéon-Assas, Institut des Hautes Études internationales de Paris), pp. 87-91 ; R.G.D.I.P., 1993, p. 411-418 ; Les langues et le droit international, Droit international et diversité des cultures juridiques, Journée Fraco-allemande, S.F.D.I., Paris, 2007, p. 123. L’étude toujours actuelle de Mandelstan (A.), La protection des minorités, R.C.A.D.I., 1923, vol., p. 367. ; Enfin, v. Pierre-Caps (S.), Peut-on parler d’un droit européen des minorités ? , A.F.D.I., 1994, p. 72. L’article 14 de la Convention européenne (4 novembre 1950) de son côté prohite toute discrimination « … fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ». ([5]) Conformément à la décision 1999/256 de l'Ecosoc du 27 juillet 1999. Elle est devenue : Sous-commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme. ([6] ) Bipoun-Woum (J.-M.), Le droit international africain : Problèmes généraux –Règlements des conflits, Ed. L.G.D.J., 1970, p. 125. ([7]) Idem., p. 125. ([8]) Voir le débat suscité par l’affaire germano-polonais : C.P.J.L, Arrêt, Écoles minoritaires en Haute-Silésie, Série A, n° 15, 26 avril 1928 : « La convention germano-polonaise du 15 mai 1922 relative à la Haute –Silésie accordent à tout ressortissant la liberté de déclarer, selon sa conscience et sous sa responsabilité personnelle, qu’il appartient ou non à un minorité (…) ainsi que de déclarer qu’elle est la langue d’un élève ou d’un enfant de l’éducation duquel il est responsable » ( p. 46) décidait la Cour. ([9]) Dans l’Avis consultatif, C.I.J., 21 juin 1971, on note : « Dans le Sud-Ouest africain, la petite minorité blanche n'a jamais constitué une population autochtone. Les intérêts de la population blanche ne sauraient donc y excuser l'application de la politique d'apartheid », Rec., 1971, p. 51. ([10]) Hart (H. L. A.), The Concept of Law, 1961, pp. 5. ([11]) Résolution à la 28ème session ordinaire de la Commission Africaine, 23 octobre–6 novembre 2000. ([12]) Stavenhagen (Adolfo), Les conflits ethniques et leur impact sur la société international, Revue internationale de sciences sociales, 1991, n° 127, p. 124. ([13] ) Réserve française à la Convention internationale sur les droit civils et politiques, 16 décembre 1966. ([14]) La Charte de l’Organisation de l’unité africaine (25 mai 1963), article II : « les objectifs de l'Organisation sont les suivants : Renforcer l'unité et la solidarité des Etats africains ; Coordonner et intensifier leur coopération et leurs efforts pour offrir de meilleures conditions d'existence aux peuples d'Afrique… ». ([15]) Préambule, Considérant : « les peuples ont le droit inaliénable de déterminer leur propre destin ». ([16]) Capotorti (F.), Etude des droits des personnes appartenant aux minorités ethniques, religieuses et linguistiques, New York, Nations Unies, 1991, par. 568. v. aussi son Cours général de droit international public, RCADI, 1994, p. 9. ([17]) Comité des droits de l’homme, aff., n° 24/1977, Sandra Lovelace, 30 juillet 1982 ; Aff. n° 167/1984, Ominayak, 26 mars 1990 ; Aff. n° 358/1989, RL et Connors c. Canada, 5 novembre 1991. ([18]) La Cour africaine des droits de l’homme est officiellement née le 25 janvier 2004. L’Union des Comores est le quinzième Etat africain à ratifier le protocole qui permet l’entrée en vigueur de la Cour. ([19]) V. par exemple, Communication 254/2002 - Mouvement des Réfugiés Mauritanien au Sénégal pour la défense des droits de l'Homme/Sénégal. ([20]) v. en particulier, C.P.J.I., Ecoles militaires en Haute-Silésie, Pologne c. Allemagne, 26 avril 1928, Série A, n° 15. ([21]) La question de l’existence et du statut des minorités est abordée par la Cour de justice des communautés européennes en 2008. La Cour déclare : « A supposer même que le véritable but de l’association requérante fût de promouvoir l’idée qu’il existe en Grèce une minorité ethnique, cela ne saurait constituer une menace pour une société démocratique”. Elle ajoute : « L’existence de minorités et de cultures différentes dans un pays constitue un fait historique qu’une société démocratique devrait tolérer, voire protéger et soutenir selon des principes du droit international », CEDH, Affaire Tourkiki enosi Xanthis et autres c. Grèce, 27 mars 2008. Sur le fond, La C.E.D.H. faisait suite à la demande de deux associations musulmanes de la minorité turque de Thrace occidentale qui avaient été interdites pour avoir fait figurer le mot “turc” dans leur intitulé. L’interdiction en 1986 de “l’Association turque de Xanthi” et en 2001 de “l’Association culturelle des femmes turques de la région de Rodopi” constitue des violations du droit à la liberté de réunion et d’association. v. en particulier C.E.D.H., Affaire Mathieu-Mohin et Clerfayt, 2 mars 1987 ; Affaire Hirst c. Royaume-Uni, 6 octobre 2005. Affaires dans lesquelles la Cour n’a pas retenu l’allégation d’atteinte à l’article 14, combiné au Protocole n° 1. v. aussi : Berger (V.), Jurisprudence de la Cour européenne des droit de l’homme, Ed. Sirey, Paris, p. 537 et s. ([22] )C.E.D.H., Affaire de la République turque de Chypre nord, Chypre c. Turquie, 10 mai 2001. ([23]) L’article 2 de la Charte indique que « Toute personne a droit à la jouissance des droits et libertés reconnus et garantis dans la présente Charte sans distinction aucune, notamment de race, d’ethnie, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ». ([24] ) Rappelons que la France a émis une réserve à l'article 27, au nom de l'universalisme républicain, arguant du fait que, étant "une et indivisible", les minorités (ethniques, culturelles, linguistiques ou religieuses) n'y existent pas. V. les commentaires de Tomuschat (Ch.), Protection of Minorities under article 27 of the International Covenant on Civil and Political Rights, Mél. Mosler, Springer, Berlin, 1983, p. 949. ([25]) Sawadogo (M.), Une nouvelle approche des peuples autochtones, Courrier ACP/UE, Bruxelles, N° 194, 2002, pp. 32-33 ; v. aussi Rouland (N.), Pierre-Caps (S.), Poumarede (J.), Droits des minorités et des peuples autochtones, PUF, Paris, 1996, p. 10. ([26]) Conformément à la résolution 6/36 du Conseil des droits de l’homme du 14 décembre 2007, un mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones est mis en place. Ce mécanisme d’experts subsidiaire du Conseil des Droits de l’homme, dotera le Conseil d’une compétence thématique en matière de droits des peuples autochtones de la manière et dans la forme voulues par le Conseil.
([27]) Yadh Ben Achour, Souveraineté et protection internationale des minorités, RCADI, 1996, p. 355. ([28]) La Déclaration a été validée par l'Assemblée Générale des Nations Unies par consensus, le 13 septembre 2007. Le droit à l’autodétermination conféré à tous les peuples est confirmé par le texte de la déclaration qui est devenue le texte de base pour faire évaluer l'attitude des États envers les peuples indigènes. Ce texte pourrait s’appliqué aux peuples Pygmées du Bassin du Congo.
([29]) Principe que l’on trouve dans les motivations de la Cour européenne : « L’existence de minorités et de cultures différentes dans un pays constitue un fait historique qu’une société démocratique devrait tolérer, voire protéger et soutenir selon des principes du droit international », v. la décision précitée : CEDH, Affaire Tourkiki enosi Xanthis et autres c. Grèce, 27 mars 2008. ([30])Virally (M.), Panorama du droit international contemporain, RCADI, tome 183, (1983-V), p. 47. ([31]) A quelques rares exceptions constituée par un Etat comme le Nigéria. ([32]) v. notamment, l’article premier de la Constitution du Congo, 20 janvier 2002, « La République du Congo est un Etat souverain, indivisible, laïc, social et démocratique ». L’article premier de la Constitution du Sénégal (7 janvier 2001) introduit une variante qui intéresse le sujet : « La devise de la République du Sénégal est : "Un Peuple - Un But - Une Foi" ». Elle est reprécisée par l’article 5 : « Tout acte de discrimination raciale, ethnique ou religieuse, de même que toute propagande régionaliste pouvant porter atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat ou à l'intégrité du territoire de la République sont punis par la loi ». La Constitution du Cameroun (18 janvier 1996) aborde avec emphase la question dès son préambule : « Le Peuple camerounais, fière de sa diversité linguistique et culturelle, é1ément de sa personnalité nationale qu'elle contribue à enrichir, mais profondément conscient de la nécessité impérieuse de parfaire son unité, proclame solennellement qu'il constitue une seule et même Nation, engagée dans le même destin et affirme sa volonté inébranlable de construire la patrie camerounaise sur la base de l'idéal de fraternité, de justice et de progrès ». ([33]) La clarté et la fermeté du droit international sur ce point n’ont pas changées depuis la Société des Nations. On retrouve ces principes clairement posés par la résolution adoptée par l'Assemblée de la Société des Nations, le 21 septembre 1922 : «L'Assemblée, tout en reconnaissant le droit fondamental des minorités à être protégées par la Société des Nations contre toute oppression, insiste sur le devoir qui incombe aux personnes appartenant à des minorités de race, de religion ou de langue, de coopérer en citoyens loyaux, avec la nation à laquelle ils appartiennent maintenant...». ([34]) Déclaration du 18 décembre 1992. ([35]) La Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, édite en son Article premier : 1. Les Etats protègent l'existence et l'identité nationale ou ethnique, culturelle, religieuse ou linguistique des minorités, sur leurs territoires respectifs, et favorisent l'instauration des conditions propres à promouvoir cette identité. 2. Les Etats adoptent les mesures législatives ou autres qui sont nécessaires pour parvenir à ces fins ([36] ) Le Biafra résume la revendication des Igbo. La république du Biafra était un État sécessionniste de 1967 à 1970 situé dans la partie Sud-Est du Nigeria, la plus riche en réserve de pétrole et situé au Sud, sur la côte atlantique. Revendication pour le pouvoir étatique aux mains des deux autres ethnies majoritaires du Nigeria déclencha une guerre civile avec la déclaration d'indépendance de la république du Biafra par son chef Odumegwu Emeka Ojukwu le 30 mai 1967. Une des raisons de la sécession était que l'ethnie Igbo, en majorité chrétienne et animiste souhaitait s'affranchir de la tutelle fédérale des Haoussa, en majorité musulmans. Cette guerre politique, religieuse et ethnique, très meurtrière, s'acheva le 15 janvier 1970 (capitulation le 12 janvier) avec la réincorporation de la république dans le Nigéria. C’est par le renforcement du pouvoir policier de l’Etat que la revendication prit fin. Or, on sait que ni la chrétienté, ni l’islam ne sont des religions d’origine africaine. ([37]) Le conflit de secession pris forme avec le raliement de l’ancien colonisateur aux insurgés du Katanga (Actuel Congo-démocratique). A l’indépendance du Congo belge, la dissolution de la compagnie Union minière du Haut-Katanga les troubles commencèrent. Les premières tensions débutèrent en 1960 avec l'indépendance du pays. En 1961, l'U.M.H.K. se rangea du côté des sécessionnistes lors de la révolte du Katanga et l'assassinat de Patrice Lumumba, le premier ministre Congolais élu après la colonisation. Là aussi, un éléments exogène dans l’histoire de ces pays est déterminant. ([38]) Saâd Regragui, Le devoir d'assistance étrangère aux peuples en danger, La troisième dimension du droit des peuples, préface de M. Bedjaoui, Maroc, 1991, pp. 46 ss. ([39]) Gros-Espiell (Hector), Le droit à l’autodétermination, application des résolutions de l’Organisation des Nations Unies, New York, Nations Unies, 1979, p. 9. ([40]) Catherine (A.) et Plateau (J.-Ph.), Land relations under unbearable stress: Rwanda caught in the Malthusian trap, Journal of Economic Behavior and Organization, 34, 1998, p.1-47 ; Chretien (J.-Pierre), L'Afrique des Grands Lacs : deux mille ans d'histoire, Aubier, 2000, 411 p. On sait que les exacerbations ethniques au Rwanda date du temps du colonisateur allemand, puis belge. Il constitue l’élément structurant de l’organisation sociale et politique mise en place dans les années vingt et trente. Jusqu'à la fin des années cinquante, les enseignants, les intellectuels, les ethnologues et les universitaires accréditent le mythe d'une société rwandaise composée de Tutsis évolués et de Hutus faits pour obéir, engendrant de grandes frustrations chez ces derniers. Des observateurs ont aussi vu dans le problème rwandais une réplique induite du conflit linguistique belge. Il est indéniable que les Wallons, qui étaient majoritaires au début au Rwanda, et les Flamands continueront sur le sol Rwandais leurs luttes idéologiques et d'influence. En 1958, le basculement du soutien belge aux Tutsi vers un soutien aux Hutu est articulé à la fois sur les demandes des Tutsi d'indépendance politique, comme partout en Afrique, et sur le développement de la présence des Flamands au Rwanda qui verront dans les Hutu un peuple opprimé comme eux.[]
([41]) De Witte (B.), Minorités nationales: reconnaissance et protection, Pouvoirs, n° 57, 1991, p. 116. ([42]) Ce texte sur l’adhésion à l’union protège les droit des minorités : en juin 1993, le Conseil européen de Copenhague a reconnu le droit pour les pays d'Europe centrale et orientale d'adhérer à l'Union européenne lorsqu'ils auront rempli les trois critères suivants : institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme, le respect des minorités ; des économies de marché viable ; reprise de l'acquis communautaire ; souscrire aux diverses finalités politiques, économiques et monétaires de l'Union européenne. Ces critères d'adhésion ont été confirmés par le Conseil européen de Madrid de décembre 1995.
([43]) C.I.J., Avis consultatif : « dans le cas du Sud-Ouest africain l'autodétermination peut fort bien, dans la pratique, se trouver réduite à une sorte d'autonomie locale dans le cadre d'un système de coopération plus large » audience du 17 mars 1971). Cela revient en fait à nier le droit à l'autodétermination, tel que l'envisage la Charte des Nations Unies », 21 juin 1971. ([44]) Acte constitutif de l’U.A., article 4, (h) : « Le droit de l’Union d’intervenir dans un Etat membre sur décision de la Conférence, dans certaines circonstances graves, à savoir : les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l’humanité ». ([45]) Quelques Etats ne l’ont pas encore ratifié : Botwana, Centrafrique, Cap-Vert, Cote-d’ivoire, Comores, Congo Démocratique, Guinée-équatoriale., Erytré, Libéria, Lesotho, Nigeria, Mozambique, Mauritanie, Namibie, Siera-Léone, Afrique du Sud, Sarawi arabe démocratique, Sao-Tomé, Swaziland. Ces pays, comme les autres, ayant des sérieux différends culturels et linguistiques seraient mieux avisés de procéder à des évolutions par le droit. ([46]) En effet, outre la question du droit à l’autodétermination du peuple timorais, celle du système représentatif de l’Etat indonésien était posée : C.I.J., Timor oriental, arrêt, 30 juin 1995. v. notamment : Jouannet (E.), R.G.D.I.P., 1996, p. 673. Dans sa décision la Cour avalise les droits que les Timorais tiennent des Nations-Unies : « 15. Dans sa résolution 384 (1975) du 22 décembre 1975, le Conseil de sécurité a demandé d'une part «à tous les Etats de respecter l'intégrité territoriale du Timor oriental ainsi que le droit inaliénable de son peuple à l'autodétermination et d'autre part «au Gouvernement indonésien de retirer sans délai toutes ses forces du Territoire », n°15. ([47]) L’affaire portant sur l’indépendance du Katanga (1992), une province de la République démocratique du Congo, a été soumis à la Commission africaine par le Congrès du Peuple Katangais. La Commission a recours à une démarche extensive du droit à l’autodétermination prévu à l’Article 20 conjointement avec le droit à l’existence. Elle avait considéré qu’il n’y avait pas de preuve de violation d’aucun des droits protégés par la Charte, sa décision reconnaît la population du Katanga comme un peuple, dans le sens d’un groupe au sein de l’Etat congolais. La décision a ensuite développé le contenu du droit à l’autonomie du peuple Katangais. L’apport de la Commission africaine est indéniable sur le sujet. ([48]) v. Communication, Legal Resources Foundation c. Zambie, 29ème Session ordinaire, Tripoli, Libye, le 7 mai 2001. ([49])L’absence notoire de législateur, dit le Pr. Karagianis, dans la société internationale est, en revanche, susceptible de rendre toute évolution radicale du droit international sujet de compréhensible, voire de légitime étonnement. V. dans Karagiannis (Sym.), Des traités d’échange de populations au nettoyage ethnique, Miskolc Journal of International Law, v. 5, n° 1. ([50]) Koskenniemi (M.), Droit international et hégémonie, une reconfiguration, Cambridge review of International Affairs, 2004, vol. 17, pp. 197.
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