Journal of the International Law Department of the University of Miskolc |
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Vol. 3. (2006) No. 2. pp. 1-21. |
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Péter KOVÁCS[1]:
Les institutions spécialisées des Nations Unies – dans le texte et la pratique de l’article 57 de la Charte[2]
Les institutions spécialisées sont considérées comme les instances onusiennes les plus proches de la vie quotidienne de l’homme. Malgré cela, le texte de l’article 57 règle d’une manière assez rudimentaire l’établissement des liens entre l’ONU et les instances existantes ou seulement envisagées en 1945: "1. Les diverses institutions spécialisées créées par accords intergouvernementaux et pourvues, aux termes de leurs statuts, d’attributions internationales étendues dans les domaines économique, social, de la culture intellectuelle et de l’éducation, de la santé publique et autres domaines connexes, sont reliées à l’Organisation conformément aux dispositions de l’article 63. 2. Les institutions ainsi reliées à l’Organisation sont désignées ci-après par l’expression « institutions spécialisées »." La version anglaise du texte présente des différences mineures par rapport au texte français : " 1. The various specialized agencies, established by intergovernmental agreement and having wide international responsibilities, as defined in their basic instruments, in economic, social, cultural, educational, health, and related fields, shall be brought into relationship with the United Nations in accordance with the provisions of Article 63. 2. Such agencies thus brought into relationship with the United Nations are hereinafter referred to as « specialized agencies »." Prima facie les différences sont les suivantes : pour « agency » le mot « institution » a été choisi. Quant à « responsibilities » on peut comprendre qu’en français, « attributions » reflète mieux son sens que « responsabilités ». En ce qui concerne la troisième différence, on peut constater que tandis que le texte français reflète plutôt un état des choses (« sont reliés »), la formule anglaise plus longue et plus lourde, suggère une obligation pro futuro (« shall be brought into relationship »). Le texte français semble aussi plutôt neutre (« les institutions ainsi reliées ») par rapport à la version anglaise (« such agencies thus brought into relationship ») qui semble sous-entendre le résultat d’une certaine sélection. Qu’on note encore que la santé publique est tout simplement « health » en anglais. En ce qui concerne le choix du mot pour « institution » au lieu d’agence, la sémantique en elle-même ne l’explique pas. D’après Larousse, une des significations[3] pour l’agence (« Organisme administratif chargé d’une mission d’information et de coordination dans un domaine déterminé ») couvrirait d’une manière satisfaisante l’activité des institutions[4] spécialisées, et même une de ces institutions – il est vrai que justement celle qui est liée d’une manière atypique[5] à l’ONU, c’est-à-dire qui est plutôt sous ses auspices, porte ouvertement le nom « agence » / « agency » : Agence Internationale de l’Energie Atomique. La consultation d’un dictionnaire unilingue pour l’explication du contenu anglais, ne nous élucide pas trop[6]. Les parties respectives du Commentaire Goodrich-Hambro[7] et de la première version du Commentaire Cot-Pellet[8] n’ont pas cru important de s’occuper des raisons de cette différence, vraisemblablement à cause de l’absence de problème d’interprétation ou de différend juridique y relatif. En effet, cette différence semble être plutôt de nature stylistique : elle n’a jamais causé de problème majeur d’interprétation. Le language onusien contient quelquefois une différence d’optique : un des documents d’information récents utilise le mot agence comme un chapeau, couvrant les organes et les programmes du Conseil économique et social et les institutions spécialisées[9]. S’agit-il d’une simple négligence de la part d’un fonctionnaire ? Certainement pas, car plusieurs documents onusiens vont dans le même sens comme par exemple celui[10] qui traite les événements irakiens sur le site Internet de l’ONU : ici sous « agences de l’ONU », on fait référence à plusieurs organes de nature différente y compris deux institutions spécialisées notamment l’UNESCO et l’OMS (accompagnées par la CESEAO, le HCR, l’OCHA, le PNUE et l’UNICEF[11]). Le service de presse a fait allusion à la coopération de deux agences, l’OMS et l’UNICEF[12]. Ailleurs, le service d’information des Nations Unies qualifie d’« agence spécialisée » l’Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC), un organe inséré dans la structure du Secrétariat[13] ou bien le Programme Alimentaire Mondial (PAM)[14]. Idem en ce qui concerne la coopération de la FAO, du FIDA (Fonds international de développement agricole) et du PAM[15]. Le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) a également reçu la qualification « agence »[16]. Cela veut probablement dire que la tendance du français onusien de nos jours préfère l’utilisation du terme « agence » dans le cas des organismes où travaillent les « agents » de l’ONU, le terme agent étant entendu dans le sens que lui attribue le droit international public[17]. L’agence en français et dans l’ONU chapeaute donc les institutions spécialisées ainsi que les programmes institutionnalisés, les fonds et les organismes. Bien que dans le langage quotidien « agency » soit sans doute traduit en français par « agence », le français utilisé dans le droit international et surtout le français onusien emploie alternativement « institution » et « agence » selon les cas, ce qui pourrait aboutir à de sérieux ennuis. Cependant il ne faut pas oublier qu’il s’agit de deux cercles concentriques où la version française (l’agence) dispose d’une portée bien plus grande que la version anglaise (agency)[18]. Le choix des termes doit être recherché avant tout par l’exégèse des documents des négociations diplomatiques. Cependant, avant de commencer l’analyse des travaux préparatoires de la Charte, il semble inévitable de jeter un coup d’oeil sur l’expérience de la Société des Nations. Sans connaître les acquis et les défaillances de la SDN en la matière, on aurait du mal à suivre les dilemmes de San Francisco en ce qui concerne l’article 57. La Société des Nations a déjà joui d’une famille[19], même si sa structuration et la clarté des liens inhérents laissaient à désirer. Toutefois, le Pacte de la SDN a contenu des engagements et des buts humanitaires et techniques[20] et il a dû tenir compte des expériences acquises avant 1919. En effet, l’activité des unions administratives créées lors de la deuxième moitié du XIXème siècle a réussi à démontrer que les Etats étaient prêts à sacrifier une certaine partie de leur souveraineté, essentiellement dans les domaines techniques. Le succès relatif de la coopération multilatérale ainsi que la prise des décisions en commun, le transfert de certaines compétences mineures à des instances internationales permanentes ont conforté la présomption que les différentes formes de la coopération permanente multilatérale peuvent compléter la vie interétatique classique. A l’instar de l’adage ubi societas, ibi jus, on a pu constater à cette époque que l’approfondissement de la coopération technique internationale secrétait des normes internationales et différentes formes d’organisation. Lors de la réalisation de l’idée de Woodrow Wilson – la création de la SDN, on a puisé donc dans l’expérience des unions administratives créées préalablement comme l’Union Télégraphique Internationale (1865), l’Union Postale Universelle (1874), le Bureau International des Poids et Mesures (1875), l’Organisation Météorologique Mondiale (1878), l’Union pour la Protection des Œuvres Littéraires et Artistiques (1883), l’Institut International des Statistiques (1885) ou le Comité Maritime International (1897), etc. Les unions administratives ou en d’autres termes les bureaux internationaux ont effectué une activité considérable mais dans une forme embryonnaire de coopération. Il est arrivé souvent que l’Etat de siège se charge de la gestion des affaires courantes par son ministère des affaires étrangères ou bien par une autre autorité, comme le Conseil fédéral (Bundesrat) à Berne car les bureaux en question ne disposaient pas d’effectif permanent[21]. A cause de leur vocation technique et de leur utilité reconnue, la SDN a dû trouver le moyen approprié pour assurer des liens et des rapports juridiques avec ces organisations préexistantes. En plus, parallèlement à la création de la SDN[22], l’Organisation internationale du travail [23] a aussi vu le jour. Les liens établis entre la SDN et les organismes anciens et neufs n’étaient pas cependant équilibrés ; toute la structure de cette coopération témoignait du peu d’attention portée à la logique juridique et aux règles modernes de l’administration publique. En simplifiant les choses, il existait trois types d’organismes institutionnels : a) les organismes stricto sensu, b) les commissions techniques et c) les organisations techniques. Or, les domaines de la coopération ont été répartis d’une manière largement contradictoire : l’Organisation internationale du travail – dont le budget a été assuré par l’Assemblée générale de la SDN – a été classifiée comme « organisme » relié à la SDN, tandis que l’Organisation d’hygiène, l’Organisation de communication ou bien l’Organisation de la coopération intellectuelle ont été considérées comme organisations techniques. La réalisation de certains engagements dans les domaines sociaux ou sanitaires (dont plusieurs appartiennent de nos jours au domaine de la lutte contre le crime transnational)[24] des Etats membres de la SDN a été confiée aux commissions techniques. Qu’elles soient organisations techniques ou commissions techniques, elles étaient toutes placées sous la tutelle de l’Assemblée générale et du Conseil de la SDN. A l’époque, Hatschek a fait la distinction entre subordinations souple et intime : dans le premier cas, il s’agissait seulement d’échange d’information et de la mise à disposition des services et de l’appareil de la SDN. Dans le deuxième cas, le Secrétariat de la SDN a rempli les fonctions effectuées jadis par l’organe décisionnel de l’union administrative et le Conseil de la SDN a dû approuver les accords négociés et en plus, par décision du Conseil de la SDN, le Secrétariat de la SDN a pu absorber les tâches de l’union donnée en la privant ainsi de son autonomie budgétaire[25]. Une résolution précoce de l’Assemblée générale de la SDN a circonscrit ainsi la philosophie suivie : les organisations techniques « devront garder assez d’autonomie et de souplesse pour que les membres de la Société aient un intérêt pratique à les utiliser, et cependant être soumises au contrôle des organes responsables de la direction générale de la Société, en vue de vérifier la conformité des dispositions proposées avec les principes et l’esprit du Pacte, conformément aux articles XIX et XX »[26]. Dans l’interprétation de Scelle ceci voulait dire que « les conventions conclues « sous les auspices » disons mieux, sous le contrôle de la SDN soient juridiquement conformes aux normes constitutionnelles du pacte et politiquement concordantes avec la « politique générale de la Société » »[27]. Les bureaux internationaux[28] préexistants[29] auraient dû être reliés en tant qu’organisme, en vertu de l’article 24 du Pacte de la SDN – mais finalement ils ont préféré maintenir leur indépendance complète durant l’existence de la SDN. En ce qui concerne la solution choisie, des critiques ont été formulées durant l’existence de la SDN, aussi bien par le monde extérieur que par les professionnels internes. Georges Scelle a écrit notamment que « ces organismes n’ont pas été institués d’après un plan d’ensemble ; chacun d’eux l’a été selon l’opportunité du moment, sous une forme particulière, avec le souci constant de réaliser un compromis entre les méfiances, les susceptibilités, parfois même les rivalités des gouvernements détenteurs de situations prétendûment acquises »[30]. En plus et outre les remarques répétées sur le vice du « double emploi » dans l’activité de la famille de la SDN, on lui a reproché le plus souvent la position hiérarchiquement inadéquate du domaine social. Même si le siège de ces organisations se trouvait en général à Genève, le profil de la politique étrangère du Conseil (mais ceci vaut finalement aussi à l’Assemblée générale de la SDN) composé des ministres des affaires étrangères n’a pas pu garantir d’écho réel aux propositions souvent techniques de ces organisations et commissions[31]. C’est ainsi que l’ancien premier ministre australien et président du Conseil de la SDN en 1936, Stanley Melbourne Bruce a reçu le mandat du Secrétaire général d’esquisser les grandes lignes d’une réforme administrative majeure de la SDN. Le « rapport Bruce »[32] a été présenté juste avant le déclenchement de la deuxième guerre mondiale, aussi il est facile a posteriori à le considérer mort-né. Cependant ses constats et ses propositions ont influencé incontestablement les idées des pères fondateurs de l’ONU quand ils ont travaillé sur la rédaction de l’article 57. Le « rapport Bruce » a proposé qu’un plus grand accent soit mis sur les affaires économiques et sociales et que la SDN soit dotée d’un organe spécial afin de rendre les activités de ce genre plus cohérentes, plus claires et plus visibles. Il a proposé donc un Comité central pour les Questions Economiques et Sociales et même un projet de « constitution » a été préparé par les experts autour de Bruce. Selon le projet, 24 représentants gouvernementaux et 8 experts auraient formé un Comité dont la vocation principale aurait été la direction et la supervision des comités travaillant sur les questions sociales et économiques. L’idée du rapport Bruce relative à la création d’un tel Comité a été approuvée in abstracto le 14 décembre 1939 par l’Assemblée générale de la SDN et même une décision a été adoptée sur la mise en place d’un Comité central sans que cela intéresse trop le public[33] considérant à juste titre la SDN désormais moribonde[34]. Bien que l’idée ait été approuvée en général, des critiques ont été formulées cependant quant à l’opportunité de traiter d’une manière similaire les questions humanitaires, sociales et de santé d’une part, et les affaires économiques et financières de l’autre. Le souci du respect de l’autonomie et des compétences de l’OIT a été également souligné ainsi que la nécessité de ne pas entraver la politique des Etats en matière de lutte contre le commerce des stupéfiants[35]. Ainsi les idées du « rapport Bruce » n’ont pas été réalisées avant leur résurrection onusienne dans la structure du Conseil économique et social, organe principal de la nouvelle organisation née à San Francisco. En ce qui concerne une réforme éventuelle des organismes ainsi que des organisations et des commissions techniques, les années de guerre n’ont pas empêché l’organisation des conférences visant à articuler les meilleurs cadres de coordination internationale de certaines activités importantes pour toute l’humanité. Les structures et les organisations existantes à l’époque de la SDN ont essayé à faire valoir leur intérêt ou de les concilier avec les impératifs de la coalition anglo-américaine et soviétique. C’est dans ce contexte que le président Roosevelt a convoqué la conférence des Nations Unies sur l’alimentation et l’agriculture à Hot Springs (tenue en mai-juin 1943) où on a lancé les préparatifs de la construction de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture dont la constitution a été finalement adoptée à la conférence de Québec d’octobre 1945. La création du Fonds monétaire international et de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement est due également à une initiative américaine qui s’est réalisée à la conférence de Bretton Woods de juillet 1944 précédant donc les négociations de Dumbarton Oaks sur l’ONU entre les 21 août-7 octobre 1944. L’adoption de la convention sur l’aviation civile lors de la conférence tenue du 1er novembre au 7 décembre 1944 à Chicago et la création de l’Organisation de l’aviation civile internationale s’insèrent dans le même contexte. Pour certains d’entre eux, on trouve quelques antécédents dans l’organigramme de la SDN : l’Organisation économique et financière (ès qualité d’« organisation technique ») ou la Commission internationale de navigation aérienne en tant qu’un des « bureaux internationaux » conçus comme organismes reliés à la SDN. En ce qui concerne l’Organisation internationale du travail, la conférence de Philadelphie de mai 1944 a abouti à l’adoption d’une déclaration sur les principes et les objectifs ainsi que les réformes constitutionnelles de 1945 et de 1946. S’agissait-il finalement d’un fait accompli pour l’ONU stricto sensu ? Jacques Lemoine a écrit dans la première édition du présent commentaire que « lorsque s’ouvre la réunion de Dumbarton Oaks (…) deux points semblent désormais acquis : la nouvelle organisation centrale sera dotée d’un Conseil économique et social et chaque secteur technique sera confié à une organisation spécialisée dans le domaine considéré : division du travail et coordination pour donner cohérence à l’ensemble »[36]. La partie pertinente du document de Dumbarton Oaks ne différait pas sensiblement du texte définitivement adopté à San Francisco. Le verbe du premier paragraphe de l’actuel article 57 se trouvait à Dumbarton Oaks[37] encore au conditionnel (au lieu de « shall » : « should » était écrit). En ce qui concerne les rapports avec les institutions spécialisées, les compétences reconnues au Conseil économique et social se limitaient « à examiner leurs rapports et à coordonner leurs activités par le moyen de consultations avec celles-ci et de recommendations à elles adressées »[38]. Ces compétences auraient englobé aussi l’examen des budgets administratifs[39] des institutions spécialisées grosso modo à l’instar des rapports entre la SDN et l’OIT. Il est à noter cependant que ces compétences ont été reconnues au Conseil économique et social – déjà avant que sa position d’organe principal ne soit définitivement arrêtée. Goodrich et Hambro rappellaient déjà que la formule « established by intergovernmental agreement and having wide international responsibilities » (« créées par accords intergouvernementaux et pourvues (…) d’attributions internationales étendues ») avait été absente du texte de Dumbarton Oaks. Elle est due à la proposition du Comité II/3 de la conférence de San Francisco et la formule y employée était très proche de celle définitivement retenue. Le Comité II/3 a recommandé que « the various specialized intergovernmental organizations and agencies having wide international responsibilities » devraient être reliées aux Nations Unies[40]. Selon le rapport du Comité II/3, ceci ne préjugerait en rien la faculté du Conseil économique et social de conclure des accords « avec d’autres types d’agences intergouvernementales » (« other types of intergovernmental agencies into relationship with the Organization »)[41]. La Commission préparatoire a fait la distinction entre les organisations intergouvernementales dans le sens large et les institutions spécialisées (« intergovernmental agencies » and « specialized agencies »)[42] et ces dernières ont déjà été entendues dans le sens de « créées par accords intergouvernementaux et pourvues d’attributions internationales étendues». En ce qui concerne les premières (y compris donc les organisations régionales), selon la Commission préparatoire, le Conseil économique et social pourrait négocier des accords avec elles si ceci lui semblait désirable[43] (« bringing into relationship such other intergovernmental agencies, including those of a regional character, as are not considered as being within the definition of Article 57 but which is considered desirable to bring into relationship »)[44]. Selon Goodrich et Hambro, il s’agit ici d’un constat implicite que ces organisations régionales ne sont pas pourvues d’attributions internationales étendues[45]. Cette restriction a été d’ailleurs proposée par la délégation du Canada[46] et elle visait à reconnaître le statut important de ces organisations per se, sans que la conclusion d’un accord bilatéral avec l’ONU doive produire un effet constitutif de l’acquisition de cette position[47]. On a accepté aussi l’autre proposition canadienne sur l’énumération des domaines d’activités de ces organisations[48]. L’attribution étendue doit se réaliser donc « dans les domaines économiques, social, de la culture intellectuelle et de l’éducation, de la santé publique et autres domaines connexes ». En ce qui concerne ces domaines, on voit d’ailleurs une grande similarité avec les sphères d’activités des organisations et des commissions techniques de la SDN. Le nombre relativement bas de changements textuels s’explique selon Lemoine « d’une part, par les préoccupations relatives au maintien de la paix et de la sécurité internationales, aux responsabilités respectives du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale et au droit de veto, au sort des territoires coloniaux et, d’autre part par une grande prudence à l’égard d’une coopération économique et sociale internationale dont les généreux principes sont fixés en termes éclatants mais dont les contours demeurent flous et sujets à exploration pragmatique »[49]. Goodrich et Hambro ont examiné aussi bien l’éventuelle connotation fonctionnelle de cette allusion aux liens interorganisationnels qui – rappelons-le – est plus dynamique en anglais qu’en français (« shall be brought into relationship » contre « sont reliées »). Le changement du « should » pour « shall », effectué lors de la conférence de San Francisco, s’explique par la volonté d’exclure la possibilité de considérer l’établissement de ces liens comme une pure faculté ou option : il s’agit donc d’une obligation[50]. Cette obligation n’a produit ses effets qu’une fois que la décision sur l’avenir de l’organisme concerné avait été prise. Goodrich et Hambro sont parvenus à retrouver les constats de la Commission préparatoire sur l’avenir des organisations et institutions préexistantes comme l’Union postale universelle ou l’Institut international de l’agriculture qui n’étaient pas liés organiquement à la SDN malgré la promesse de l’article 24 du Pacte. Apparemment, la Commission préparatoire n’a pas voulu leur reconnaître le droit subjectif pour la survie : elle voulait réserver le droit de l’Organisation des Nations Unies de décider pour chacun des cas si son maintien ou son absorption (dans une autre institution spécialisée ou dans un organe onusien) serait plus opportun[51]. Dans le cas où la décision concernant le maintien d’un ancien organisme était affirmative, les liens avec les Nations Unies devaient être établis le plus vite possible : en revanche ils doivent être établis immédiatement si une organisation est créée après l’entrée en vigueur de la Charte[52], comme le Rapport de la Commission préparatoire l’a souligné[53]. Du point de vue technique, le Comité des négociations avec les institutions spécialisées, organe subsidaire du Conseil économique et social, a été chargé de mettre au point les accords[54]. Puisque la Charte ne contient pas de détails relatifs au contenu de ces accords, suite aux remarques de la Commission préparatoire[55], c’est le Conseil économique et social qui a défini leur contenu envisagé dans sa résolution en établissant le Comité des négociations. Les éléments importants devaient donc être la représentation réciproque, l’échange d’informations et de documents, le pouvoir de propositions de sujets à l’agenda, le suivi des recommendations de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social, l’assistance à la mise en oeuvre des décisions du Conseil de sécurité, assistance au Conseil de tutelle, la possibilité de saisir la Cour internationale de Justice pour avis consultatif, services de statistiques, etc.[56]. Le Comité a été habilité aussi à négocier l’opportunité d’inclure des références aux liens spéciaux, aux questions du personnel, aux services fiscaux et techniques éventuellement communs[57]. Les organisations préexistantes accueillies en tant qu’institutions spécialisées ont cru important de réviser leur statut proprio motu : outre les actualisations stylistiques toujours nécessaires, une certaine adaptation au contexte et aux défis de l’après guerre a également eu lieu. Créées ou révisées, la grande partie des institutions spécialisées sont nées dans les années quarantes[58]. Il y en a eu aussi, bien sûr, de plus récentes[59] – qui sont, pour leur part, quelquefois aussi successeurs d’organismes anciens[60]. Il y a eu des exemples tant d’absorption (p. ex. l’Office international d’hygiène public par l’Organisation mondiale de la santé ou bien l’Institut international de l’agriculture par l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture) que de maintien d’une ancienne organisation par transformation en institution spécialisée (p.ex. l’Union postale universelle ou bien l’Union internationale des télécommunications), ce qui voulait dire que son statut ne différait pas de celui qui a été garanti à l’Organisation internationale du travail. Certains organismes, l’Office international Nansen pour les réfugiés par exemple, ont subi plusieurs métamorphoses : cette fonction a été confiée provisoirement à l’UNRRA durant la guerre puis à l’éphémère Organisation internationale des réfugiés (qui était d’ailleurs une institution spécialisée) pour être définitivement attribuée à un organe subsidiaire : le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Le seul grand échec connu, la non-entrée en vigueur de la Charte de l’Organisation internationale du commerce ne relève pas directement du statut juridique des institutions spécialiées. De plus, après le provisorium quasi éternel du GATT, l’Organisation mondiale du commerce, créée par l’accord de Marrakech de 1994, a également trouvé sa place dans les structures onusiennes : sa position diffère cependant de celle des institutions spécialisées ordinaires. Il serait cependant erroné de croire que les anciennes organisations voulaient, à tout prix, être liées aux Nations Unies : se souvenant de l’impuissance de la SDN, plusieurs organisations et gouvernements voulaient que ces instances soient efficaces et puissantes per se : leur but était de voir « des organisations capables de se tenir seules debout et de survivre si les Nations Unies ne voyaient pas le jour, si elles étaient déchirées par des conflits politiques ou si elles n’avaient qu’une vie éphémère comme celle de la SDN »[61]. La distance juridique relative entre l’ONU et les institutions spécialisées – telle qu’elle a été conçue par les experts des Grands de la coalition antihitlérienne à Dumbarton Oaks et par les cinquante-et-un Etats de la Conférence de San Francisco – s’explique par des raisons juridiques ainsi que politiques : i. certains craignaient une éventuelle faillite de l’ONU et on croyait que l’établissement d’une distance des organisations finalement techniques par rapport à la grande politique pourrait garantir leur survie ; ii. cette distance a facilité dans certains domaines de la coopération technique la participation des Etats encore non admis à l’organisation mondiale et en même temps, elle a laissé du temps à la réflexion aux Etats fondateurs de l’ONU avant de décider de se joindre à une coopération sectorielle. iii. la technicité et l’expertise avaient une importance pratique plus grande dans les institutions spécialisées que dans l’ONU stricto sensu[62]. Les organisations créées depuis la création juridique de l’ONU se sont insérées sans difficulté majeure dans les cadres préétablis. Il y a aussi des exemples de transformation d’un organe subsidiaire en institution spécialisée : c’est le cas notamment de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel[63]. D’une manière similaire, la longue marche[64] de l’Organisation mondiale du tourisme ne s’est achevée que récemment, le 23 décembre 2003, quand l’Assemblée générale a adopté à l’unanimité la résolution reconnaissant l’OMT comme une institution spécialisée de plein droit[65]. Le choix pragmatique d’un statut spécial pour les organisations entourant l’ONU a servi d’ailleurs aussi les intérêts des anciens pays de l’Axe et de leurs satellites pour qui l’admission dans certaines institutions spécialisées – essentiellement dans les domaines techniques et culturels – a été effectuée en général beaucoup plus vite qu’à l’Organisation des Nations Unies, en tant que telle. La participation à une institution spécialisée a ouvert plusieurs portes : y compris la participation à beaucoup de traités onusiens. Idem, en ce qui concerne les pays qui voulaient rester en dehors de l’ONU comme notamment la Suisse, pendant un demi-siècle, ou les Etats dont l’admission se heurtait à des obstacles politiques. D’une manière similaire, les Etats ont pu décider assez librement de leur sortie de certaines institutions (ou la suspension de leur participation) p.ex. la Pologne de l’OIT (suite au coup militaire de Jaruzelski en 1981) ou bien les pays communistes (au début des années cinquantes) et les Etats-Unis (entre 1984-2003) de l’UNESCO sans que cette distance soit interprétée comme un éventuel refus des idées des Nations Unies. La même distance permettait aux Etats de participer aux traités de codifications onusiennes soit en tant que membre de l’ONU, soit comme membre d’une institution spécialisée (ou du statut de la CIJ) Quant à la localisation géographique des sièges des institutions spécialisées, on est témoin de la politique délibérée de la décentralisation et de la délocalisation : cette différence par rapport aux usages de la SDN s’explique d’une part par les faits accomplis par les organismes ayant bien travaillé à Genève, d’autre part par le souci d’une répartition géographique équitable des institutions internationales, pour ne pas oublier les prix et les frais élevés des immeubles à New York et en tenant compte aussi du lobbying de plusieurs Etats traditionnellement liés à la vie internationale et diplomatique. Pour voir si une organisation pré-existante tombe sous l’article 57, les deux principes sous-jacents sont les suivants : l’organisation doit satisfaire un besoin fonctionnel et le domaine économique et social nécessite l’activité des institutions intergouvernementales autonomes coordonnées par l’ONU[66]. Le résultat définitif est un système plus décentralisé que celui réalisé sous les auspices de la SDN[67]. Schermers qualifie ce concept comme l’incarnation de l’idée de la décentralisation fonctionnelle[68]. Cette autonomie se dégage déjà de la comparaison des verbes utilisés : selon le Pacte les organismes seront placés sous l’autorité de la SDN, tandis que les institutions spécialisées sont seulement reliées à l’ONU. Il est à noter cependant que malgré cette différence textuelle, l’organigramme de la SDN a utilisé la référence expresse aux organismes reliés y entendant l’OIT, la CPJI, les bureaux internationaux et l’Union internationale des secours[69]. Selon Rousseau, trois critères doivent être réunis pour qu’une oganisation tombe dans le champ d’application de l’article 57. Il devrait s’agir « a) des Organisations internationales dotées d’une compétence propre, distinctes à la fois des Commissions internationales et des organes purement nationaux ; b) des Organisations intergouvernementales, distinctes des Organisations non gouvernementales qui ne sont pas ouvertes aux Etats comme tels ; c) des Organisations à compétence spécialisée, distinctes des Organisations (universelles ou régionales) à compétence politique générale »[70]. Le critère de « l’organisation intergouvernementale » s’est nuancé cependant depuis que la FAO a accueilli en tant que membre de plein droit la Communauté européenne en 1993. Les transferts de compétences de la part de ses Etats membres à la Communauté économique européenne ont rendu quasi inévitable[71] ce changement, basé néanmoins sur une modification de la constitution de la FAO permettant le dépôt de la demande d’admission[72] des organisations régionales d’intégration économique[73]. D’une manière similaire et pour les mêmes raisons, les Communautés européennes sont devenues membre de plein droit de l’OMC le 1er janvier 1995. Il y a des projets également en ce sens[74] s’agissant de l’autre pilier de l’intégration européenne, la Communauté européenne de l’énergie atomique, pour que celle-ci exprime également ses souhaits pour devenir membre de l’AIEA : l’Agence internationale de l’énergie atomique n’est ouverte cependant qu’aux Etats. Les attributions des institutions spécialisées visent la réglementation internationale des activités de leurs Etats membres par voie conventionnelle, recommandatoire ou le cas échéant par des décisions et résolutions obligeant les Etats. L’Organisation internationale du travail est l’architype de la première variante, l’Organisation mondiale de la santé, l’Organisation météorologique mondiale ou l’Organisation de l’aviation civile internationale représentent la troisième variante et la grande majorité des institutions spécialisées peuvent être regroupées sous la deuxième[75]. Le caractère des liens à nouer avec l’ONU n’est pas explicitement mentionné dans le texte de l’article 57 mais dans un renvoi à l’article 63[76]. Sans vouloir empiéter sur le commentaire de cet article, il est utile de rappeler que le texte de Dumbarton Oaks n’a pas exclu une référence plus directe dans le texte du futur article 57. Le rôle reconnu par l’article 63 au Conseil économique et social dans l’établissement des rapports conventionnels a été respecté sauf l’exemple notable de l’AIEA dont le partenaire contractuel était l’Assemblée générale. De nouveau avec l’exception de l’AIEA (qui le fait pour l’Assemblée générale et quand ceci est « approprié » pour le Conseil de sécurité[77]), les institutions spécialisées font des rapports annuels au Conseil économique et social. Il est à noter d’ailleurs, que l’AIEA est aussi censée faire des rapports au Conseil économique et social[78] mais il s’agit ici d’autres documents que les grands rapports annuels. En interprétant la formule « sont reliées à l’Organisation », Rousseau rappelle que ce « rattachement ne signifie pas intégration »[79] et qu’il serait judicieux de parler de l’autonomie qui se manifeste dans la composition et dans le choix du siège. Il s’agit d’une autonomie dont les limites se visualisent dans le régime administratif et budgétaire[80]. Il est donc clair que la position des institutions spécialisées vis-à-vis des organes principaux de l’ONU est plus contractuelle que hiérarchiquement subordonnée[81]. En ce qui concerne la garantie de la position accentuée de l’ONU vis-à-vis des institutions spécialisées malgré l’autonomie très large – pratiquement proche de l’indépendance – de ces dernières, elle se manifeste dans le droit de l’Assemblée générale d’examiner le budget préparé par l’institution spécialisée. Les accords conclus entre les institutions spécialisées et l’ONU font aussi référence à une consultation régulière avant la présentation définitive du budget pour examen à l’Assemblée générale. Selon Schermers, c’était un des points les plus délicats durant la négociation des accords car de nombreuses organisations craignaient la perte de marges de manoeuvres[82]. La pratique des premières décades a montré d’ailleurs que faute d’inclusion des spécialistes budgétaires dans les délégations gouvernementales envoyées aux sessions de l’Assemblée générale ainsi que faute de temps, cet organe crucial n’était souvent pas dans la position d’examiner in merito ces budgets[83]. En même temps, l’harmonisation des règles relatives à l’établissement du budget dans les organisations a diminué l’éventualité des conflits. Ici, l’article 57 et l’article 17, paragraphe 3, s’entremêlent. Ce dernier stipule en effet que « L’Assemblée générale examine et approuve tous arrangements financiers et budgétaires passés avec les institutions spécialisées visées à l’article 57 et examine les budgets administratifs desdites institutions en vue de leur adresser des recommendations ». Il ne s’agit donc pas d’un pouvoir d’approbation qui sous-entendrait le cas échéant un droit de veto contre une activité allant éventuellement à l’encontre des intérêts onusiens. Au début des années cinquante, on n’a pas exclu cependant l’unification du budget de l’ONU et des institutions spécialisées, mais cette idée fut vite abandonnée[84]. Le droit d’examen des budgets administratifs des institutions spécialisées a été cependant exercé par l’Assemblée générale : ses recommandations visaient une plus grande compatibilité des différents chapitres chez les différentes organisations. Le contrôle a été effectué essentiellement par le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) travaillant pour la Commission des questions administratives et budgétaires (Cinquième Commission) de l’Assemblée générale avec « le souci d’assister les institutions spécialisées dans l’examen de leur budget plutôt que de leur imposer ses conceptions »[85]. Les recommandations adressées par l’Assemblée générale aux institutions spécialisées concernent « la préparation et présentation uniforme des budget, règlements communs concernant les conditions d’emploi du personnel, régime commun des pensions, règlements financiers communs, procédure commune de vérification des comptes, méthodes communes en matière de financement des budgets, règles administratives se rapportant à l’assistance technique, méthodes budgétaires relatives aux programmes financés par les contributions volontaires, établissement des services communs »[86]. Malgré l’autonomie budgétaire, l’harmonisation des structures budgétaires peut inciter les institutions spécialisées à faire dépendre l’exécution d’une modification budgétaire de l’approbation de l’Assemblée générale[87]. Les institutions spécialisées sont censées coopérer entre elles : cette règle peut être déduite de la logique même de l’attente d’un travail efficace, mais elle peut être insérée expressis verbis dans leurs statuts comme c’est le cas dans le paragraphe 6 de l’article III du statut de l’AIEA. Comment garantir la coordination des activités des institutions spécialisées ? En ce qui concerne la précision des principes, c’est le Comité consultatif des questions administratives (CCQA ou en version anglaise CCAQ[88]) qui joue le rôle principal. Le CCQA est l’organe subordonné du CEB[89] (l’équivalant de l’ancien CAC[90] (ACC en anglais) établi sur la proposition de la résolution 13 (III) du Conseil économique et social[91]. Ceci veut dire non seulement la coordination des activités des instititutions spécialisées mais aussi de plusieurs autres organes onusiens[92]. Dans les cadres onusiens, on le place dans les structures du Secrétariat. Une fois les grandes lignes établies, la réalisation de la bonne coordination des activités de l’ONU et des institutions spécialisées est confiée à un comité fonctionnel de double subordination : le Comité du programme et de la coordination (CPC). Construit en 1962 comme comité permanent de l’ECOSOC, le CPC a reçu un nouveau positionnement en 1976[93] et depuis il est subordonné aussi bien à l’Assemblée générale qu’à l’ECOSOC. Ses membres sont élus par l’Assemblée générale, sur proposition du Conseil économique et social[94]. Dans l’organigramme[95] de l’ONU, le caractère atypique de l’AIEA, de l’OMC (et pendant longtemps de l’OMT aussi) se manifeste dans un classement particulier en tant qu’organisations apparentées à côté de deux organisations de désarmement[96]. Les mots « organisations apparentées » donnent « related organizations » en anglais. La différence sémantique entre apparenté et related est à noter et on peut observer que la version anglaise de l’article 57 utilise également l’adjectif « related » (« economic, social, cultural, educational, health, and related fields ») là où la version française se contente de la formule « autres domaines connexes ». « Connexe » a rendu donc sa place à « apparenté » sans causer de problème d’interprétation réel. L’interprétation systématique et pratique ne résout pas tout et ne peut sûrement pas effacer l’importance de l’interprétation judiciaire. Or, on ne peut pas dire que la Cour internationale de Justice a contribué d’une manière décisive à rendre le contenu de l’article 57 plus clair. Puisque l’avis consultatif sur l’interprétation de l’accord du siège du bureau régional de l’OMS en Egypte[97] et l’avis sur la composition d’un comité de l’IMCO[98] n’avaient pas nécessité la clarification de l’article 57, la « pénombre »[99] relative de cet article n’a été dissipée que récemment par la Cour internationale de Justice. Les juges de La Haye ont analysé l’article 57 en conjonction avec les articles 58 et 63 dans les termes suivants dans l’avis consultatif sur la Licéité de l’utilisation des armes nucléaires[100]. Après avoir donné une définition qui pourrait s’appliquer aux organisations intergouvernementales en général[101], la Cour a affirmé fermement que : « Comme le montrent ces dispositions, la Charte des Nations Unies a jeté les bases d’un « système » tendant à organiser la coopération internationale de façon cohérente par le rattachement à l’Organisation des Nations Unies, dotée de compétences de portée générale, de diverses organisations autonomes et complémentaires, dotées de compétences sectorielles. L’exercice de ces compétences par les organisations appartenant au « sytème des Nations Unies » est coordonné, notamment, par les accords de liaison conclus entre l’ONU et chacune des institutions spécialisées (…) »[102].
La Cour a mis l’accent sur l’importance des principes de la fonctionnalité et de la spécialité : « Il résulte de l’ensemble des textes susmentionnés que la Constitution de l’OMS ne peut être interprétée, en ce qui concerne les compétences attribuées à cette organisation, qu’en tenant dûment compte, non seulement du principe général de spécialité, mais encore de la logique du système global envisagé par la Charte. Si, conformément aux règles qui sous-tendent ce système, l’OMS est pourvue, en vertu de l’article 57 de la Charte, « d’attributions internationales étendues », celles-ci sont nécessairement limitées au domaine « de la santé publique » et ne sauraient empiéter sur celles d’autres composantes du système des Nations Unies »[103]. (…) « Toute autre conclusion viderait d’ailleurs très largement de son contenu la notion d’institution spécialisée : on imagine en effet mal ce que cette notion pourrait encore signifier s’il était jugé suffisant, pour qu’une organisation de cette nature soit habilitée à traiter de la licéité de l’utilisation de certaines armes, que cette utilisation soit susceptible d’avoir des effets sur ces objectifs. Il est par suite difficile de soutenir qu’en autorisant diverses institutions spécialisées à demander des avis à la Cour conformément au paragraphe 2 de l’article 96 de la Charte l’Assemblée générale ait entendu leur permettre de saisir la Cour de questions relevant de la compétence d’attribution de l’Organisation des Nations Unies »[104]. Supra, on a déjà fait allusion aux différents comités et sous-comités chargés de garantir la bonne coopération des institutions spécialisées. Au début, le succès de cette coordination laissait à désirer et Kaufmann a qualifié ce phénomène comme le complexe d’égalité souveraine des institutions spécialisées[105]. Ce symptôme est seulement partiellement le résultat de la rivalité des organisations et de leurs personnels. L’autre source était la mauvaise coordination dans l’appareil ministériel des Etats membres et l’assurance technocratique des experts envoyés aux réunions de la FAO, de l’OMS ou de l’OMM qui ne voyaient pas l’utilité de solliciter des directives politiques de la part de leurs ministères des affaires étrangères[106]. Dans les années quatre-vingts, de nombreuses critiques ont encore été formulées à mettant en doute l’efficacité réelle de cette coordination[107]. De nos jours, la nécessité d’une action efficace réclame souvent plus qu’une simple coordination. Il est intéressant de voir le jumelage en forme de collaboration étroite – qu’un document informatif onusien n’hésite pas à qualifier de « fusion de six agences »[108] – en matière de lutte contre la maladie SIDA. (Qu’on note ici les pieds d’égalité (equal footing) des institutions spécialisées et des organes subsidiaires dans le langage onusien). Le programme abrévié ONU-SIDA a été créé en 1996 pour coordonner les efforts en la matière du PNUD, de l’UNESCO, du FNUAP, de l’UNICEF, de l’OMS et de la Banque internationale de reconstruction et du développement. Dans la lutte contre l’épidémie SARS, l’OMS travaille avec l’OACI, la FAO et l’OMC dans une forme similaire de partenariat[109]. L’« assaut final contre la poliomyélite en Afrique de l’Ouest » se fait par une coopération entre l’OMS, la Banque Mondiale comme institutions spécialisées complétées par le concours de l’UNICEF et des différents gouvernements et des initiatives privées[110]. La FAO travaille ensemble avec le Fonds international de développement agricole (FIDA) et le Programme alimentaire mondial (PAM) pour une aide d’urgence et l’augmentation des investissements dans la lutte contre la faim des pays en développement[111]. On trouve un parallélisme similaire dans les rapports présentés sur la réalisation de la résolution 1514 (XV) par certains organismes de l’ONU. Les activités développées du PNUD, du CNUCED et du PNUE sont aussi récapitulées sans mettre l’accent sur la différence juridique entre institutions spécialisées et organes subsidiaires[112]. L’efficacité de la coordination entre le FMI, la Banque mondiale et l’OMC laisse à désirer comme Flory le constate en ce qui concerne le droit international du développement[113]. Le programme d’action du Sommet mondial pour le développement social de Copenhague (1995) a confié le rôle de la coordination des responsabilités des institutions de Bretton Woods, de l’OMC et des autres institutions à l’Assemblée générale[114] et non pas au Conseil économique et social. En ce qui concerne l’attention portée à l’écologie dans le commerce, l’OMC ainsi que le PNUE et la CNUCED coopèrent – ou plutôt agissent d’une manière parallèle[115]. Par contre, dans des domaines techniques comme par exemple la télécommunication, une meilleure efficacité est à observer[116]. Le Secrétaire général a récemment analysé certains aspects des relations entre les institutions spécialisées et l’Organisation des Nations Unies. Dédié essentiellement au suivi des recommandations du rapport de la Conférence internationale sur le financement du développement[117], le document[118] du Secrétaire général concerne aussi les moyens d’une meilleure coordination entre l’ONU et les membres de la famille onusienne. On trouve beaucoup de références en particulier aux institutions de Bretton Woods, mais les propositions ne semblent pas être suffisamment concrètes : « Pour que les buts des conférences soient intégrés et rendus opérationnels dans les programmes de travail des organisations et dans leur action au niveau des pays, il faudrait une interaction plus étroite entre le Conseil économique et social, le Conseil des chefs de secrétariat et le Comité de haut niveau chargé des programmes afin que, dans leurs programmatiques, les organisations appuient la tenue des engagements des conférences ; Le Conseil des chefs de secrétariat et le Groupe des Nations Unies pour le développement devraient continuer d’appuyer la poursuite des objectifs du Millénaire et donner des directives concrètes aux organisations membres afin d’intensifier les synergies entre les objectifs des conférences et de faciliter une approche intégrée à leur suivi. Le Conseil des chefs de secrétariat devrait aussi être invité à faire des apports de fond à l’analyse stratégique des thèmes communs que le Conseil aborde pour le suivi intégré des conférences »[119]. La solution proposée n’était pas tellement innovante et elle était formulée plutôt – et comme d’habitude – en langue de bois : « Le Conseil voudra peut-être inviter tous les fonds, programmes et institutions spécialisées des Nations Unies à continuer leurs efforts vers une approche intégrée du suivi des conférences au niveau des pays, en veillant à ce que les bilans communs de pays, le plan-cadre des Nations Unies pour l’aide au développement et autres cadres semblables, dont le cas échéant, les documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté, conçus pour coordonner les activités opérationnelles, soient formulés comme mécanismes visant à une intégration plus poussée des résultats de conférences »[120]. « Le Conseil économique et social pourrait avoir une interaction plus poussée avec ses interlocuteurs intergouvernementaux des institutions de Bretton Woods, et de l’Organisation mondiale du commerce pour préparer sa réunion de printemps avec elles afin de mettre au point des approches solidaires et une même compréhension des politiques et des actions devant donner suite aux conférences et de concentrer l’attention sur les résultats, ce qui mènera la réunion à des discussions et à une issue axées sur l’action »[121]. En ce qui concerne le dilemme majeur, à savoir comment augmenter l’efficacité de la coopération tout en évitant les dommages du dédoublement irrationnel, on ne peut pas dire qu’on est arrivé à une solution optimale. Non seulement les commentateurs attirent l’attentation sur le chevauchement de plusieurs institutions spécialisées ainsi que d’organes subordonnés, mais les gouvernements ont pris une position analogue comme en témoignent les constats de la déclaration du G7 de Lille[122] : l’autorité des institutions spécialisées devrait être préservée dans « les domaines dans lesquelles elles possèdent un avantage comparatif »[123]. Or, on est souvent témoin du double emploi : « le Programme alimentaire mondiale et le Fonds intergouvernemental du développement agricole concurrencent la FAO ; la Commission du développement durable concurrence le Programme des Nations Unies pour l’environnement ; l’UNICEF, la Banque mondiale et le PNUD concurrencent l’UNESCO dans le domaine de l’éducation » comme le précise Alexandra Novosseloff.[124] Il est à noter d’ailleurs qu’au début de 2004, la FAO s’occupait de certains aspects de la grippe aviaire[125] –supposant la bonne coordination avec l’OMS et l’OMC… La FAO a reçu des compétences aussi dans la surveillance de l’exécution des engagements de la Convention de Rotterdam sur l’usage des produits chimiques dangereux et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) l’assiste dans le contrôle de la gestion des pesticides[126]. L’OMS a collaboré avec l’UNICEF en matière de la lutte contre la fièvre jaune[127]. Les problèmes de coordination ne sont pas indépendants du fait que l’ampleur de l’activité opérationnelle dépasse l’activité normative des institutions spécialisées – et tout cela se produit dans le climat de restrictions budgétaires[128]. La nécessité de recourir au financement externe a accentué l’importance de la bonne opération – au détriment de la normativité[129]. Le sous-financement traditionnel de l’ONU et le coût volumineux des opérations expliquent en partie le rôle crucial de la BIRD dans les activités multi-institutionnelles avec tous les avantages et risques que cela implique. Or, dans son rapport, le Secrétaire général a souligné l’importance des liens établis entre les institutions de Bretton Woods et les institutions sectorielles – et il a appelé ces dernières à recourir d’une manière plus substantielle et plus systématique aux facilités de la Banque mondiale[130] et il a attribué un rôle-clé à la bonne coordination des activités de la BIRD et des institutions spécialisées (et en particulier de l’OIT) ainsi que des programmes institutionnalisés (notamment le PNUD, l’UNICEF et quelques autres[131]) dans la construction de la paix (« peace-building ») dans les zones conflictuelles[132]. Cette coopération doit être basée cependant sur une approche systémique[133].
[1] Péter Kovács est professeur à l’Université de Miskolc et à l’Université Catholique Péter Pázmány (Hongrie) [2] L’article est la version à peine modifiée du chapitre publié dans le Commentaire de la Charte des Nations Unies – article par article, édité sous la direction d’Alain Pellet, Jean-Pierre Cot et de Mathias Forteau) Economica 2005 Paris Tome II p. 1515-1541 [3] « Agence. n.f (ital. agenzia) : 1. Entreprise commerciale proposant en général des services d’intermédiaires entre les professionnels d’une branche d’activité et leurs clients. Agence de voyage. Agence de presse. Agence de publicité. 2. Organisme administratif chargé d’une mission d’information et de coordination dans un domaine déterminé. Agence nationale pour l’emploi. 3. Succursale d’une banque. 4. Ensemble des bureaux, des locaux occupés par une agence » (Le Petit Larousse-Grand Format, Larousse Bordas, 1997, Paris, p. 45). [4] « Institution : (…) Ensemble des règles, régies par le droit, établies en vue de la satisfaction d’intérêts collectifs ; organisme visant à les maintenir. (…) Ensemble des formes ou des structures politiques établies par la loi ou la coutume et relevant du droit public. (…) » (Le Petit Larousse-Grand Format, p. 551) ; « Institution : Au sens courant, terme d’emploi fréquent pour désigner des réalités assez variées, mais caractérisées par l’idée d’une manifestation créatrice, de la volonté humaine. On distingue habituellement : les institutions – organes, qui sont des organismes dont le statut et le fonctionnement sont régis par le Droit, comme le Parlement ou la famille ; les institutions mécanismes, qui sont des faisceaux de règles régissant une certaine institution-organe ou une situation juridique donnée, tels que le droit de dissolution, le mariage ou la responsabilité civile » (Lexique des termes juridiques (sous la direction de Raymond Guillien et de Jean Vincent), 5e éd., Dalloz, 1981, Paris, p. 237). [5] Il y a lieu de souligner la situation spéciale de l’AIEA qui fait des rapports aussi bien à l’Assemblée générale qu’au Conseil de Sécurité. Contrairement aux institutions spécialisées stricto sensu, ses rapports interinstitutionnel ne se réalisent pas uniquement via le Conseil économique et social. [6] « Agency : 1. a business or an organization that provides a particular service especially on behalf of other business or organizations : an advertising/employment agency (…) ; international aid agencies caring for refugees. 2. especially Am.E : A government department that provides a particular service » (Oxford Advanced Learner’s Dictionary, A.S. Hornby (ed.), 6th edition, Oxford University Press, 2000, Oxford p. 23). [7] Goodrich-Hambro, The Charter of the United Nations, London, 1947, Stevens, pp. 324-350. [8] Commentaire écrit par Jacques Lemoine dans la première édition de l’ouvrage, La Charte de l’ONU Commentaire de la Charte des Nations Unies – article par article, édité sous la direction d’Alain Pellet et de Jean-Pierre Cot, Economica 1985 Paris pp. 891-909. [9] Dossier sur la réforme à l’ONU – http://www.un.org/french/reform/dossier02.htm. On y trouve inter alia une allusion à « la fusion de six agences » pour désigner la coopération contre le SIDA du PNUD, de l’UNESCO, du FNUAP, de l’UNICEF, de l’OMS et de la BIRD. [11] CESEAO : Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale, HCR : Haut-Commissariat pour les Réfugiés, PNUE : Programme des Nations Unies pour l’Environnement. [12] « Deux agences de l’ONU se mobilisent contre l’apparition de la fièvre jaune au Libéria », Nouvellesonu@list.un.org (le 25 février 2004). [13] « L’Agence spécialisée de l’ONU signale une possible hausse de la production d’opium en 2004 », Nouvellesonu@list.un.org (le 18 février 2004). [14] « (…) l’agence a reçu récemment des dons (…) », « les rations de l’agence » in Mesures d’urgence du Programme Alimentaire de l’ONU en Corée, Nouvellesonu@list.un.org (le 25 février 2004). [15] « Trois agences de l’ONU s’entretiennent avec le Président Chirac sur l’aide d’urgence et l’augmentation des investissements », Nouvellesonu@list.un.org, dépêche du 1er mars 2004. [16] V. la dépêche intitulée « Lancement aujourd’hui du rapport de la Commission du secteur privé : les entreprises locales constituent le plus fort potentiel de développement », Nouvellesonu@list.un.org, dépêche du 1er mars 2004. [17] Pour qualifier quelqu’un comme agent international, « l’exercice d’une activité au sein de l’organisation et qui lui est imputable est le critère déterminant » (P. DAILLIER et A. PELLET, Droit international public, 7ème éd., LGDJ, 2002, Paris, p. 631. [18] Cette tendance est d’autant plus remarquable car elle s’oppose au langage traditionnel des constitutionnalistes, pour qui c’est l’institution qui est une notion plus large ; c’est l’institution qui peut faire valoir ses intérêts à travers ses agences. [19] Selon Schermers, on peut parler d’une famille d’organisations internationales quand les relations mutuelles sont plus fortes qu’un échange occasionnel d’information ou qu’elles vont au-delà de la présence des mêmes Etat-membres ou qu’elles ne se limitent pas à un simple accord sur l’envoi des observateurs. Dans une famille d’organisations, les tâches sont réparties et chaque organisation joue son propre rôle dans une unité plus large, dotée des liens institutionnels. (Henry G. Schermers, International Institutional Law, Sijthoff & Nordhoff, 1980, Alphen aan den Rijn, Rockville, p. 837). [20] Article 23 du Pacte de la SDN : « Sous la réserve, et en conformité des dispositions des conventions internationales actuellement existantes ou qui seront ultérieurement conclues, les membres de la Société : a) S’efforceront d’assurer et de maintenir des conditions de travail équitables et humaines pour l’homme, la femme et l’enfant sur leurs propres territoires, ainsi que dans tous pays auxquels s’étendent leur relations de commerce et d’industrie, et, dans ce but, d’établir et d’entretenir les organisations internationales nécessaires ; b) S’engagent à assurer le traitement équitable des populations indigènes dans les territoires soumis à leur administration ; c) Chargent la Société du contrôle général des accords relatifs à la traite des femmes et des enfants, du trafic de l’opium et autres drogues nuisibles ; d) Chargent la Société du contrôle général du commerce des armes et des munitions avec les pays où le contrôle de ce commerce est indispensable à l’intérêt commun ; e) Prendront les dispositions nécessaires pour assurer la garantie et le maintien de la liberté des communications et du transit, ainsi qu’un équitable traitement du commerce de tous les membres de la Société, étant entendu que les nécessités spéciales des régions dévastées pendant la guerre de 1914-1918 devront être prises en considération ; f) S’efforceront de prendre des mesures d’ordre international pour prévenir et combattre les maladies ». Article 24 : « 1. Tous les bureaux internationaux antérieurement établis par traités collectifs seront, sous réserve de l’assentiment des parties, placés sous l’autorité de la Société. Tous autres bureaux internationaux et toutes commissions pour le règlement des affaires d’intérêt international qui seront créés ultérieurement seront placés sous l’autorité de la Société. 2. Pour toutes questions d’intérêt international réglées par des conventions générales, mais non soumises au contrôle de commissions ou de bureaux internationaux, le secrétariat de la Société devra, si les parties le demandent et si le Conseil y consent, réunir et distribuer toutes informations utiles et prêter toute l’assistance nécessaire ou désirable. 3. Le Conseil peut décider de faire rentrer dans les dépenses du Secrétariat celles de tout bureau ou commission placé sous l’autorité de la Société ». [21] Paul Guggenheim, Lerhbuch des Völkerrechts I. Verlag für Recht und Gesellschaft AG, 1948, Basel, pp. 487-488. [22] Partie I du traité de Versailles (et des autres traités de paix p. ex. Trianon, Neuilly, St-Germain). [23] Partie XIII du traité de Versailles (et des autres traités de paix p. ex. Trianon, Neuilly, St-Germain). [24] Commission consultative des questions sociales, Comité central permanent de l’opium, Commission consultative du trafic de l’opium et autres drogues nuisibles, Commission d’experts en matière d’esclavage. [25] J. Hatschek, Völkerrecht – als System rechtlich bedeutsamer Staatakte Scholl Deihertsche Verlagsbuchhandlung, 1923, Leipzig, pp. 268-269. [26] Cette résolution date de 1920 et elle est citée sans numérotation par Georges Scelle, Précis de droit des gens (Principe et systématique I et II), CNRS, 1984, Paris (reproduction de l’édition Sirey 1932, 1934), 2ème tome, p. 508. [27] Scelle, Georges, op. cit., p. 509. [28] Malgré leur longueur, il vaut la peine de tenir compte de la définition et des explications d’Anzilotti : « les bureaux internationaux exercent leurs attributions au moyen d’une seule personne ou même de plusieurs personnes qui cependant agissent isolément, bien que sous la dépendance hiérarchique l’une de l’autre ; (…) les bureaux internationaux (…) à savoir des Offices bureaucratiques fondés sur le principe de la dépendance hiérarchique à l’exclusion de la collégialité, sont souvent constitués sous la dépendance et pour le service d’organes collectifs collégiaux ; (…) quand on parle de Bureaux internationaux au sens strict, on entend désigner les bureaux de ce que l’on appelle les « Unions internationales administratives », associations d’Etats constituées pour la réalisation d’intérêts collectifs déterminés, qui rentrent dans ce que l’on a coutume d’appeler l’activité administrative de l’Etat, associations généralement ouvertes et d’une durée longue ou indéfinie. Les attributions de ces Bureaux internationaux se limitent, en général, au rassemblement, à la conservation et à la publication de documents et de matériaux d’information ; souvent s’y ajoute la faculté d’en donner des copies et des extraits en conformité des règlements y relatifs ; leur travail est de même utilisé pour la préparation de révisions, éventuelles ou périodiques, de la convention d’union, pour donner des consultations, etc. » (Dionisio Anzilotti, Cours de droit international (réédition de l’édition 1929 chez Sirey), LGDJ, 1999, Paris, p. 324). [29] Bureau hydrographique international, Bureau international d’information et d’études sur l’assistance aux étrangers, Bureau central international pour le contrôle du commerce des spiritueux en Afrique, etc. [30] Scelle, Georges, op. cit., p. 505. [31] Lemoine, op. cit., p. 893. [32] Le développement de la collaboration internationale dans le domaine économique et social, Rapport du Comité spécial, doc. A.23.1939, Genève, 22 août 1939. [33] La Rockefeller Foundation était cependant prête à offrir 100 000 $ aux coûts de la mise en oeuvre de cette réforme. Une souscription populaire a été lancée aux Etats-Unis, par l’Association Américaine de la Société des Nations (American League of Nations Association) pour augmenter cette somme (Martin D. Dubin, « Toward the Bruce Report » in The Lague of Nations in Retrospect / La Société des Nations : rétrospective, Gruyter, 1983, Berlin, New York, p. 62). [34] Le comité préparatif du Comité Central a tenu une seule réunion, les 7-8 février 1940, à La Haye. [35] Dubin, op. cit., p. 60. [36] pp. 899-900. [37] Chapitre IX(A)(2). [38] Chapitre IX(A)1(c) ; chez Lemoine, op. cit., p. 900. [39] LEMOINE, loc. cit. [40] UNCIO, Report of the Rapporteur of Committee II/3, Doc. 861, II/3/55(1) p. 13 (Documents, X, p. 281) ; Goodrich-Hambro, op. cit., p. 325. [41] UNCIO, Report of the Rapporteur of Committee (...), pp. 4-5 (Documents, X, pp. 272-3) ; Goodrich-Hambro, loc. cit. [42] Goodrich-Hambro, loc. cit. [43] Goodrich-Hambro, loc. cit. [44] Report of the Preparatory Commission (…), Doc. PC/20, p. 40 (in Goodrich-Hambro, loc. cit.). [45] Goodrich-Hambro, loc. cit. [46] Lemoine, op. cit., p. 900. [47] Ibid., p. 901. [48] Id. [49] Id. [50] Goodrich-Hambro, op. cit., p. 344. [51] Ibid., p. 326. [52] Ibid., p. 345. [53] « The various specialized agencies should be brought into relationship with the United Nations at the earliest practicable moment, and that other agencies whose establishment is contemplated should be brought into relationship immediately upon their establishment » (Report of the Preparatory Commission (…), Doc. PC/20, p. 40). [54] Etabli par une décision du 16 février 1946 (UN, Economic and Social Council, Official Records, First Year : First Session, pp. 171-2). [55] Report of the Preparatory Commission (…), Doc. PC/20, pp. 40-8. [56] Goodrich-Hambro, op. cit., p. 346. [57] Ibid., p. 346. [58] L’Organisation de l’aviation civile internationale (1944), l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (1945), l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (1945), le Fonds monétaire international (1944), la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (1945), l’Organisation mondiale de la santé (1946), l’Organisation internationale du travail (réorg. 1946), l’Union internationale des télécommunications (réorg. 1947), l’Union postale universelle (réorg. 1947), l’Organisation météorologique mondiale (réorg. 1947), l’Organisation intergouvernementale consultative de la navigation maritime (1948) transformée en l’Organisation maritime internationale (1975), l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle. [59] La Société financière internationale (1955), l’Association internationale pour le développement (1960), le Fonds international du développement agricole (1976). [60] L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (1967) a hérité des tâches de l’Institut international de coopération intellectuelle et de l’Union pour la protection de la propriété industrielle. [61] Lemoine, op. cit., p. 897. [62] Henry G. Schermers, op. cit., p. 838. [63] L’ONUDI a été créée en 1966 comme organe subsidiaire de l’Assemblée générale : elle a été élevée au rang d’institution spécialisée par l’accord de 1979, en vigueur depuis 1985. [64] En 1977, par sa résolution 32/156, l’Assemblée générale a approuvé l’accord conclu avec l’Organisation mondiale du tourisme, sans garantir toutefois le statut d’une institution spécialisée. [65] A/RES/58/232. [66] Goodrich-Hambro, op. cit., p. 324. [67] Ibid. [68] Op. cit., p. 837. [69] Ursula-Maria Ruser, The League of Nations (1920-1946). Organization and Accomplishments (A Retrospective of the First International Organization for the Establishment of the World Peace), United Nations, 1996, New York and Geneva (cf. l’organigramme à la quatrième page de la couverture et à la page 129, reproduite de : Organization of the League of Nations, LON 1931 Geneva). [70] Charles Rousseau, Droit international public, Tome II, Sirey, 1974, Paris, p. 610. [71] Cf. pour un analyse approfondie Rachel Fried, « The European Economic Community – A Member of a Specialized Agency of the United Nations », EJIL, 1993, pp. 239-255. [72] L’ouverture de la FAO et la formulation de la demande de la CEE ont eu lieu en 1991, mais la procédure d’admission ne s’est achevée qu’en 1993 à cause de certains délais procéduraux impératifs. [73] Ces modifications concernent en particulier les paragraphes 3 et 4 de l’article II de la Constitution de la FAO : elles prévoient que la majorité des Etats membres de l’organisation régionale doivent être membres de la FAO et que cette organisation dispose des compétences transférées par les Etats membres qui lui permettent de prendre des décisions qui obligent ses Etats membres. [74] La Commission les a proposés au Conseil en 1992 : Comm.Doc.No.SEC(92)697. [75] Rousseau, op. cit., p. 611. Dans un sens similaire, à consulter encore Catherine Labeyrie-Menahem, Des institutions spécialisées, Paris, 1953, Pedone, pp. 132-135 ; Hanna Bokor-Szegő, The Role of the United Nations in International Legislation, Akadémiai Publ., 1978, Budapest, p. 24. [76] L’article 63 dispose : « (1) Le Conseil économique et social peut conclure, avec toute institution visée à l’article 57, des accords fixant les conditions dans lesquelles cette institution sera reliée à l’Organisation. Ces accords sont soumis à l’approbation de l’Assemblée générale. (2) Il peut coordonner l’activité des institutions spécialisées en se concertant avec elles, en leur adressant des recommandations, ainsi qu’en adressant des recommandations à l’Assemblée générale et aux membres des Nations Unies ». [77] Statut de l’AIEA, article III, § 4. [78] Statut de l’AIEA, article III, § 5. [79] Op. cit., p. 611. [80] Dans le même sens, Charles ROUSSEAU, ibid., p. 612. [81] The United Nations in Development : Reform Issues in the Economic and Social Fields - Nordic United Nations Project, April 1991, in Joachim Müller (ed), Reforming the United Nations (New Initiatives and Past Efforts), Kluwer, 1997, United Nations and The Hague, Boston, London, vol. II, p. III.24/48. [82] Henry G. Schermers, op. cit., p. 841. [83] Ibid. [84] A ce propos cf. la différence d’optique des comités CAC (Comité administratif de coordination – plutôt pour) et CCQAB (Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires – plutôt contre) dans le commentaire de Witold Zyss sur l’article 17, paragraphe 3, dans la première édition du présent ouvrage, p. 382. [85] Zyss, op. cit., p. 383. Cf. encore Martin Hill, The United Nations System : Coordinating its Economic and Social Work, Cambridge University Press, 1978, pp. 43-44. [86] Zyss, op. cit., p. 385. [87] OIT, Bureau international du travail, Conseil d’administration. « Sur recommandation de la commission, le Conseil d’administration a accepté les recommendations de la CFPI [Commission de la fonction publique internationale] sous réserve de leur approbation par l’Assemblée générale, en ce qui concerne les barèmes des traitements (ainsi que les augmentations consécutives des indemnités/versements) pour le personnel de la catégorie des administrateurs et les fonctionnaires de rang supérieur, avec effet au 1er janvier 2003. Sous réserves de leur approbation par l’Assemblée générale, le Conseil d’administration a autorisé le Directeur général à donner effet à ces mesures en apportant les amendements voulus au Statut du personnel » (GB.286/PFA/15, Genève, mars 2003 (§ 1)). [88] Le CCAQ est le sigle composé d’après le nom anglais : Consultative Committee on Administrative Questions. [89] Chief Executives Board for Coordination. [90] Comité administratif de coordination. [91] « The Economic and Social Council (…) requests the Secretary-General of the United Nations to establish a standing committee of administrative officers consisting of himself, as chairman, and corresponding officers of the specialized agencies brought into relationship with the United Nations, for the purpose of taking all appropriate steps, under the leadership of the Secretary General, to insure the fullest and most effective implementation of the agreements entered into between the United Nations and specialized agencies » (http://ceb.unsystem.org/e_231.htm). [92] En ce qui concerne le CEB, il s’agit finalement des consultations régulières communes des secrétaires généraux de l’ONU, de l’OIT, de l’UNESCO, de l’OACI, de l’OMS, de la BIRD, du FMI, de l’UPU, de l’UTI, de l’OMM, de l’OMI, de l’OMPI, de la FAO, de l’ONUDI et de l’OMT ainsi que de l’AIEA et de l’OMS. Les chefs des programmes suivants assistent aux réunions : CNUCED, PNUD, PNUE, UNHCR, UNRWA, UNICEF, FNUP, WFP, UNDCP, UNHSP (http://ceb.unsystem.org/membership.htm). [93] EC res 2008/LX. [94] EC res. 1987/94 et GA res. 42/318. [95] http://www.un.org/french/aboutun/organigramme.html et http://www.un.org/english/ aboutun/organigramme.html. [96] L’Organisation pour l’Interdiction des armes chimiques (OIAC) et la Commission préparatoire de l’Organisation du traité d’interdiction complète des essais nucléaires (OTICE). [97] CIJ, avis consultatif sur l’Interprétation de l’accord du 25 mars 1951 entre l’OMS et l’Egypte, 20 décembre 1980, Rec. 1980, pp. 73 et s. [98] CIJ, avis consultatif sur la Composition du Comité de la sécurité maritime de l’Organisation intergouvernementale consultative de la navigation maritime, 8 juin 1960, Rec. 1960, pp. 160-170. [99] Lemoine, op. cit., p. 901. [100] CIJ, avis consultatif sur la Licéité de l’utilisation des armes nucléaires par un Etat dans un conflit armé… (OMS), 8 juillet 1996, Rec. 1996, pp. 66-85. [101] Leurs statuts étant des « traités d’un type particulier » « ont pour objet de créer des sujets de droit nouveaux, dotés d’une certaine autonomie, auxquels les parties confient pour tâche la réalisation de buts communs » (CIJ, Licéité de l’utilisation des armes nucléaires… (OMS), précité, p. 75). [102] CIJ, Licéité de l’utilisation des armes nucléaires… (OMS), précité, p. 80. [103] Ibid., p. 80. [104] Ibid., pp. 80-81. [105] « The specialized agency sovereign equality complex », Johan Kaufmann, United Nations Decision Making, Sijthoff & Nordhoff, 1980, Alphen aan den Rijn, Rockville, p. 64. [106] Johan Kaufmann, loc. cit. [107] « The UN Development machinery is a cumbersome and overlapping alphabet soup which substitutes international bureaucracy for real projects. The funding mechanisms and governance systems insulate UN development-aid administration from effective accountability. Despite the emphasis on planning, however, it is not surprising that developing country matching contributions to UNDP activities are more likely to be project rather than planning oriented. (…) UN projects are not now, never have been, nor are likely to be able to transform the developing world » (cf. in Joachim Müller (ed), op. cit., vol. II, p. III.11/30 (à noter toutefois, qu’il s’agit ici d’une critique formulée par la très conservative Heritage Foundation)). [108] Dossier sur la réforme à l’ONU – http://www.un.org/french/reform/dossier02.htm. [109] Michèle Poulain, « La gestion par l’OMS des situations d’urgence sanitaire de portée internationale. L’exemple du syndrome respiratoire aigu », in Actualité et Droit International, http://www.ridi.org, novembre 2003, p. 13. [110] Nouvellesonu@list.un.org, dépêche du 20 février 2004. [111] Nouvellesonu@list.un.org, dépêche du 1er mars 2004. [112] Information submitted by the specialized agencies and other organizations of the United Nations system on their activities with regard to the implementation of the Declaration on the Granting of Independence to Colonial Countries and Peoples, E/2000/68. [113] Maurice FLORY, « Mondialisation et droit international du développement », RGDIP, 101/1997, p. 632. [114] Cf. le § 98 du programme d’action jointe à la Déclaration. Sur le rôle des Nations Unies dans la réalisation des objectifs du sommet cf. Robert Charvin, « La déclaration de Copenhague sur le développement social. Evaluation et suivi », RGDIP, 101/1997/3, pp. 635-662. [115] Winfried Lang, « Les mesures commmerciales au service de la protection de l’environnement », RGDIP, 99/1995/3, p. 560. Cf. encore Makane Moïse Mbengue, « La déclaration de Doha de la Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce et sa portée dans les relations commerce/environnement », RGDIP, 106/2002/4, pp. 855-892. [116] Blaise Tchikaya, « La première conférence mondiale pour le développement des télécommunications (La transcription juridique du développement au sein de l’UIT) », RGDIP, 99/1995/1, p. 92. [117] Rapport de la Conférence internationale sur le financement du développement, Monterrey (Mexique), 18-22 mars 2002. [118] Rapport du Secrétaire général : Rôle du Conseil économique et social dans l’application et le suivi intégrés et coordonnés des textes issus des grandes conférences et réunions au sommet organisées sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies, E/2003/67, Conseil économique et social, 15 mai 2003, session de fond de 2003, Genève, 30 juin–25 juillet 2003. [119] Rapport du Secrétaire général : Rôle du Conseil économique et social (…), E/2003/67, pp. 18-19. [120] Rapport du Secrétaire général : Rôle du Conseil économique et social (…), E/2003/67, p. 21 [121] Id. [122] Tenu les 27-29 juin 1996. [123] § 45 du Communiqué économique du G7 au Sommet de Lille. [124] « La réforme des Nations Unies : Enjeux et perspectives », à trouver sur http://www.stratisc.org/act/tri_9910_Novosseloff.html. [125] Communiqué de presse du 13 février 2004 sur Nouvellesonu@list.un.org. [126] Communiqué de presse du 24 février 2004 sur Nouvellesonu@list.un.org. [127] « Deux agences de l’ONU se mobilisent contre l’apparition de la fièvre jaune au Libéria », Nouvellesonu@list.un.org (le 25 février 2004). [128] The United Nations in Development : Reform Issues in the Economic and Social Fields - Nordic United Nations Project, April 1991, in Joachim Müller, op. cit., vol. II, p. III.24/49. [129] Ibid., p. III.24/50. [130] Enhancing International Cooperation for Developement : The Role of the United Nations System, Report of the Secretary General, New York, 26 June 1992, in Joachim Müller, ibid., p. III.30/10-11. [131] UNFPA, IFAD et WFP. [132] Enhancing International Cooperation for Developement : The Role of the United Nations System, Report of the Secretary General, New York, 26 June 1992, op. cit., p. III.30/28. [133] «… should be built upon a system-wide basis », ibid., p. III.30/28.
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