Journal of the International Law Department of the University of Miskolc


Miskolc Journal of International Law

Miskolci Nemzetközi Jogi Közlemények

 

Vol. 2. (2005) No. 1. pp. 1-31.

 


Cherifou GASSAMA[1]:

 

Le principe de restitutio in integrum dans le contentieux international des droits de l’homme

 

 

Introduction

La mise en œuvre des engagements pris, obligation primaire et fondamentale en droit international, n’aurait aucune valeur opératoire sans l’existence de la responsabilité étatique. Très tôt consacré par la jurisprudence internationale, le principe de responsabilité a mis du temps à s’exprimer à travers un régime juridique clair, constant et stable. Sa réception dans le droit international des droits de l’Homme en a profondément affecté le contenu.

 En effet, le droit international des droits de l’Homme a mis fin au caractère exclusivement inter-étatique de la responsabilité en supprimant la fiction juridique de la protection diplomatique, théoriquement acquis mais techniquement hypothétique pour des particuliers dont l’action en demande de réparation était subordonnée à l’endossement de leur réclamation par l’Etat national.

Le jus et/ou le locus standi de l’individu devant les instances internationales de protection des droits de l’Homme sera à l’origine d’un développement substantiel et qualitatif du contentieux de la responsabilité dont la finalité reste la réparation. Il n’est point besoin de préciser que la responsabilité fait naître à l’égard de tout Etat auteur d’un manquement au droit international l’obligation de réparer. C’est un principe de droit international, voire une  conception générale du droit, que toute violation d’un engagement comporte l’obligation de réparer[2] .

A cet égard, le contentieux international des droits de l’Homme, à l’instar du droit international général admet que le simple constat de violation puisse constituer une forme de réparation. Mais, celle-ci engloberait également l’obligation de non répétition, la garantie d’assurer à la partie lésée la jouissance des droits violés, le paiement d’une juste indemnité et  la  restitutio in integrum.

 Le principe de restitutio in integrum, modalité privilégiée de réparation en droit international général , suppose la remise des parties au statu quo ante. Il consiste à effacer les conséquences de l’acte illicite en plaçant les choses dans la situation antérieure à la violation. Il reste un mode de réparation par nature et non pécuniaire en principe même si, il pourrait générer des incidences financières.

 Dés lors, la restitutio in integrum implique la prescription de mesures individuelles ou collectives à effet rétroactif. Elle met à la charge de l’Etat défendeur l’obligation juridique de mettre un terme à la violation et d’en effacer les conséquences de manière à rétablir autant que faire se peut la situation antérieure à celle-ci [3]» .

Le contentieux international des droits de l’Homme, constitué par l’ensemble des litiges relatifs à l’application des conventions internationales portant sur les droits fondamentaux et portés devant une instance internationale, s’est approprié le principe de restitutio integrum comme modalité de réparation parmi tant d’autres.

Mais, quelle est la valeur et la portée du principe de restituto integrum dans le contentieux international des droits de l’Homme ?

En outre, la juxtaposition des ordres et systèmes de protection des droits de l’Homme dans la sphère internationale, ajoutée à la différence de nature des organes de mise en œuvre nous emmène tout naturellement à nous poser la question de savoir : quelles sont les pratiques et tendances jurisprudentielles qui se dégagent du contentieux international des droits de l’Homme dans l’application du principe de restitutio in integrum ?

Il ne s’agira pas pour nous de procéder à une étude intrinsèque du principe de restitutio in integrum, encore moins de le présenter. Nous nous exercerons plutôt à  le situer dans le contentieux international des droits de l’Homme. Ce qui suppose l’examen de la jurisprudence internationale des droits de l’Homme dans son ensemble.

A cet égard, la Cour Européenne des Droits de l’Homme et la Cour Inter-américaine offrent des perspectives intéressantes en raison de leur caractère juridictionnel, de la richesse de leurs activités jurisprudentielles et du volume de leurs contentieux. Aussi, notre champ sera élargi aux organes quasi-juridictionnels que sont le Comité des Droits de l’Homme et la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples qui se livrent à des activités contentieuses relatives à la mise en œuvre de la responsabilité des Etats pour manquement au droit international des droits de l’Homme.

Par ailleurs, nous ne saurions exclure la Cour Internationale de Justice et son prédécesseur, la Cour Permanente de Justice Internationale (CPJI). En effet, leur jurisprudence constitue un point d’ancrage du contentieux international des droits de l’Homme et un paramètre d’analyse incontournable dans l’appréciation et la mise en œuvre du principe de restitutio in integrum dont. La Cour Internationale de Justice, organe judiciaire principal des Nations Unies, doté d’une compétence générale et universelle, fut amenée plusieurs fois à statuer sur le contenu et la portée des droits fondamentaux, notamment en matière de réparation[4].

La question de la restitutio in integrum dans le contentieux international des droits de l’Homme soulève des intérêts à plus d’un titre. En effet, contrairement au droit international général qui tente depuis 1930 de codifier le principe de la responsabilité sans grand succès, le contentieux international des droits de l’Homme s’est doté d’un dispositif normatif qui constitue le socle du juge international en matière de réparation. Ainsi, a-t-il donné lieu à plusieurs études et rapports qui témoignent de son intérêt juridique et actuel.

Au plan doctrinal, il a suscité une controverse qui s’est cristallisée lors des travaux préparatoires de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales. A une conception large proposant des pouvoirs accrus à la Cour de Strasbourg en matière de réparation s’étaient opposés les experts gouvernementaux.

D’un point de vue pratique la restitutio in integrum reste certes un moyen efficace pour permettre aux victimes de bénéficier d’une juste réparation sans s’appauvrir, encore moins s’enrichir sans cause ou de façon injuste. Il n’en demeure pas moins que sa mise en œuvre effective se heurte à la souveraineté des Etats et ce, en raison du principe classique d’absence d’effet direct d’un jugement international dans l’ordre interne des Etats.

Notre étude ne gagne en pertinence qu’à condition d’adopter une démarche comparative afin de visiter toute la jurisprudence internationale des droits de l’Homme et de confronter les différentes pratiques du juge international dans la consécration et l’application du principe de restitutio in integrum.

En outre, une approche analytique nous permettra de cerner les différentes tendances du contentieux international des droits de l’Homme et d’en déceler les politiques et lignes jurisprudentielles existantes.

Il ressort de l’analyse de la jurisprudence que le contentieux international des droits de l’Homme ne s’écarte pas des lignes dégagées par le droit international général en matière de restitutio in integrum. En effet, il en fait une modalité de réparation théoriquement privilégiée (Chapitre I), même si la pratique révèle la difficile mise en œuvre dudit principe (Chapitre II).

 

Chapitre I :

 

La restitutio in integrum : modalité de réparation théoriquement

privilégiée dans le contentieux international des droits de

l’Homme

Des différentes modalités de réparation retenues en droit international général, la restitution in integrum est apparu très vite comme la plus appropriée. En effet, elle présente le mérite de placer les parties au statu quo ante supprimant, chemin faisant, et dans la mesure du possible, les conséquences de l’acte dommageable. C’est pour cette raison qu’elle fut considérée comme la « sanction normale de l’inexécution d’obligations contractuelles[5] ».

Le contentieux international des droits de l’Homme s’est abreuvé aux sources du droit international classique en érigeant la restitutio in integrum au rang de principe. La jurisprudence internationale des droits de l’Homme consacre de manière presque unanime la primauté du principe de restitutio in integrum (Section I).

Mais l’éclatement et la diversité du contentieux international des droits de l’Homme conduit à des approches divergentes quant à l’étendue des pouvoirs du juge (Section II).

 

SECTION I : De la consécration quasi unanime de la primauté du principe de

restitutio in integrum.

La valeur du principe de restitutio in integrum ne semble souffrir d’aucune remise en cause théorique. Sa primauté qui constitue le socle du juge international en matière de réparation, fait l’objet d’un ralliement des pratiques contentieuses qui révèlent l’unification des lignes jurisprudentielles (Para. I).

Ce constat est d’autant plus général que le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies comme la Commission Africaine des Droits de l’Homme consacrent la restitutio in integrum comme modalité de réparation et ce, en dehors de toute habilitation conventionnelle (Para. II).

 

Para. I :          L’unification des lignes jurisprudentielles quant à la primauté du principe.

L’une des particularités du droit international des droits de l’Homme est d’avoir réussi à codifier le régime de la responsabilité des Etats pour manquement à leurs obligations conventionnelles. Ce régime de la responsabilité définit les contours de la réparation en consacrant la primauté du principe de restitutio in integrum à travers les conventions européenne et américaine des droits de l’Homme. Cet ancrage normatif du principe de restitutio in integrum (A) jette les bases d’une jurisprudence largement convergente quant à la valeur théorique dudit principe (B).

 

A) L’ancrage normatif du principe de restitutio in integrum

Le principe coutumier de restitutio in integrum trouve son fondement juridique au cœur du dispositif normatif de protection des droits de l’Homme. Les articles 41 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, 63 de la Convention Interaméricaine et 27 du protocole de Ouagadougou portant création d’une Cour Africaine des Droits de l’Homme codifient la responsabilité des Etats et consacrent toutes les modalités de réparation prévues en droit international général. La restitutio in integrum figure parmi les modalités de réparation consacrées soit de façon explicite, c’est le cas des conventions européenne et interaméricaine, ou de manière implicite dans le cadre de l’article 27 du protocole de Ouagadougou du 09 juin 1998.

Toutefois, des différences de degré sont à noter dans le fond comme dans la forme des différentes dispositions relatives à la réparation. Dans le fond, les articles 63 de la Convention Interaméricaine et 27 du protocole portant création de la Cour Africaine semblent opter pour la non stratification des différentes modalités de réparation. En effet, il découle de la lettre de ces deux articles que la restitutio in integrum reste une modalité de réparation parmi tant d’autres. Par conséquent, « l’obligation de liquidation du passé »[6] , les garanties de non répétition et le paiement d’une juste indemnité à la partie lésée peuvent être utilisés tant séparément que conjointement au titre de réparation pour violation du droit international des droits de l’Homme. L’article 27 du protocole de Ouagadougou semble être le moins précis dans sa tentative de codification du régime de la réparation. En effet, il se borne à constater que la Cour Africaine des droits de l’Homme et des peuples ordonnera, en cas de violation d’un droit de l’Homme ou des peuples « …toutes mesures appropriées afin de remédier à la situation, y compris le paiement d’une juste compensation ou l’octroi d’une réparation[7]. » . Cet article assimile la restitutio in integrum à la réparation. Cette confusion laconique semble abandonner aux futurs juges africains une latitude quant à la définition du contenu et des contours de la réparation.

Dans le droit international des droits de l’Homme, l’article 41 nouveau (ancien article 50) de la convention européenne garde la particularité d’avoir marqué une préférence théorique pour la restitutio in integrum. L’effacement parfait des conséquences de la violation reste une préoccupation première et fondamentale. La structure et la lettre de l’article 41 ne laisse l’ombre d’un doute quant à la primauté du principe de restitutio in integrum.

Cependant, cette forte consécration de la primauté du principe de restitutio in integrum recèle une pathologie congénitale en la forme. En effet, l’ancien article 50 comme le nouveau article 41 de la convention européenne subordonnent la restauration de la situation antérieure à la violation à des considérations d’ordre internes.

La possibilité de réalisation de la restitutio in integrum reste suspendue à l’état du droit interne. Il s’agit là théoriquement d’un divorce fondamental d’avec l’article 27 de la convention de Vienne sur le droit des traités de 1969. Il ressort de cet article qu’un Etat ne peut invoquer le droit interne pour ne pas appliquer une obligation internationale[8].

Aussi, le traité s’impose aux différents organes de l’Etat[9] . Pourtant, la cour européenne des droits de l’Homme ne s’écarte pas de la lettre et de l’esprit de l’article 50 qu’elle applique avec rigueur conformément à ses compétences subsidiaires. En effet, la cour de Strasbourg n’interviendra que lorsque, après son constat de violation, le droit interne de l’Etat ne redresse pas le manquement signalé. Il en était ainsi dans l’affaire de Cubber contre le Royaume de Belgique. Dans cette affaire, la haute juridiction  avait relevé d’abord que les conditions d’application de l’article 50 se trouvent réunies car « la procédure qui s’est déroulée en Belgique après son arrêt n’a pas conduit à un résultat aussi proche d’une restitutio in integrum que la nature des choses s’y prêtait[10].

Il va de soi que l’article 50 fait de la restitutio in integrum une simple faculté et met ainsi à la charge de l’Etat une obligation de moyen.

Par contre, l’article 63.1 de la convention interaméricaine reste  détachable du droit interne. Il affirme une autonomie du contentieux de la réparation. Ainsi, dans les affaires Honduriennes, la cour a affirmé clairement l’autonomie de l’article 63.1 eu égard aux procédures et méthodes relevant du droit interne[11].

Quant à l’article 27 du protocole de Ouagadougou, tout laisserait croire qu’il garde une certaine autonomie par rapport au droit interne. Mais en l’absence d’une référence expresse et claire à la restitutio in integrum, on ne pourra anticiper la pratique du futur juge africain des droits de l’Homme.

En définitive, la restitutio in integrum fait l’objet d’une large consécration conventionnelle dans le droit  international  des droits de l’Homme. Ce travail de codification sera complété par une pratique jurisprudentielle largement convergente sur la valeur théorique du principe de restitutio in integrum.

 

B) Une jurisprudence largement convergente sur la valeur théorique du principe de restitutio in integrum.

L’œuvre du juge international des droits de l’Homme a permis de définir le sens du principe de restitutio in integrum et d’en fixer les contours. La réception dudit principe dans la pratique du contentieux des droits humains n’en a pas affecté la portée.

En effet, il est besoin de rappeler que la Cour Permanente de Justice Internationale avait estimé dans son arrêt du 13 septembre 1928 dans l’affaire relative à l’usine de Chorzow que « le principe essentiel qui découle de la notion même d’acte illicite et qui semble se dégager de la pratique internationale, notamment de la jurisprudence des tribunaux arbitraux, est que la réparation doit, autant que possible, effacer les conséquences de l’acte illicite et rétablir l’état qui aurait vraisemblablement existé si ledit acte n’avait été commis ». (1)

Cette position sera confirmée par la Cour Internationale de Justice dans plusieurs affaires dont la plus récente est l’affaire relative au mandat d’arrêt du 11 avril 2000 et opposant la République Démocratique du Congo à la Belgique. Dans cette affaire, la Cour a estimé que « l’émission et la diffusion, par les autorités Belges, du mandat d’arrêt du 11 avril 2000 avait méconnu l’immunité du Ministre des Affaires Etrangères en exercice du Congo … ». Après ce constat de violation, la Cour mit à la charge de la Belgique l’obligation de rétablir l’état qui aurait vraisemblablement existé en l’absence du mandat d’arrêt du 11avril 2000[12] . Ainsi, la Belgique devait « mettre à néant le mandat d’arrêt » émis contre le Ministre des Affaires Etrangères de la République Démocratique du Congo.

La Cour Européenne des Droits de l’Homme et la Cour Interaméricaine s’inscriront dans la continuité de cette ligne jurisprudentielle classique.

Dans le système européen, la primauté de la restitutio in integrum réside dans le fait que la Cour laisse à l’Etat un délai durant lequel il est appelé à effacer les conséquences de la violation.

Ainsi, dans l’affaire Vogt contre Allemagne la Cour de Strasbourg avait constaté dans son arrêt du 26 septembre que la révocation de Mme Dorothea Vogt de la fonction publique en raison de son engagement politique au sein du Parti Communiste Allemand, était contraire aux articles 10 et 11 de la convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales relative à la liberté d’expression et de réunion. C’est sur la base de cet arrêt que les parties seront emmenées à conclure un règlement à l’amiable. Il découlait des termes dudit règlement que Mme Dorothea Vogt devait non seulement être réintégrée, mais les années passées à l’écart de la fonction publique devait être comptabilisées pour le calcul de ses avantages financiers et statutaires.  La Cour de Strasbourg estima que l’accord à l’amiable conclu entre le gouvernement et la requérante revêtait « un caractère équitable »[13] . Elle ordonna la radiation de l’affaire du rôle. Cette mise en application de l’article 50 est une illustration de la préférence portée sur le principe de restitutio in integrum.

C’est cette même option qui sera affirmée avec force dans l’affaire Papamichalopoulos contre Grèce. Dans cette affaire où l’Etat Grec soulevait l’impossibilité de la restitution des terrains objet de litige pour des impératifs de défense nationale, la Cour de Strasbourg, se prononçant sur la satisfaction équitable, marqua une nette préférence pour la restitutio in integrum. Elle a estimé que « la restitution des terrains litigieux placerait les requérants, le plus possible dans une situation équivalant à celle où ils se trouveraient s’il n’y avait pas eu de manquement aux exigences de l’article 1 du protocole n°1 ». Il en découlait que c’est à « défaut de procéder à pareille restitution dans un délai de six mois à compter du prononcé du présent arrêt » que l’indemnisation devait intervenir[14] .

Cet arrêt est d’autant plus fondateur et structurant que la Cour s’est inspirée essentiellement de la jurisprudence internationale judiciaire et arbitrale. Elle n’a même pas hésité de citer le considérant principal de la Cour Permanente de Justice Internationale dans l’affaire de l’usine de Chorzow pour fonder son raisonnement en érigeant la restitutio in integrum au rang de principe et en reléguant le paiement d’une indemnité à la place d’une simple modalité subsidiaire.

La Cour interaméricaine ne s’écarte pas de cette tendance bien qu’elle soit allé plus loin dans la consécration du principe de restitutio in integrum. En effet, le juge interaméricain considère que « the obligation contained in article 63 (1) of the convention is governed by international law in all of its aspects, … [15]»

Il ressort du raisonnement du juge interaméricain que l’article 63 (1) est gouverné par le droit international dans tous ses aspects. Cette déduction  implique automatiquement la primauté théorique de la restitutio in integrum. Ainsi, aura-t-il demandé à l’Etat condamné dans son arrêt du 10 septembre 1993, en l’occurrence le Surinam, de rouvrir dans le village où vivaient les victimes une école et un dispensaire en faveur de leurs ayants droit.

D’ailleurs, cette tendance sera confirmée dans l’arrêt Castillo Petruzzi contre Pérou du 30 mai 1999 qui concernait quatre citoyens Chiliens condamnés pour haute trahison à des peines de prison à vie par un tribunal militaire péruvien spécial composé de juges sans visage (encagoulés). Dans cette affaire, la Cour s’est fondée sur la violation de l’article 8 relatif aux garanties judiciaires et de l’article 36 de la Convention de Vienne sur les relations consulaires pour déclarer l’invalidité de la procédure judiciaire dans sa totalité et demandé, à l’unanimité, une nouvelle procédure respectant entièrement les principes du procès équitable. La Cour interaméricaine va au-delà de la simple consécration de la primauté du principe de restitutio in integrum. Elle fonde sa position sur une pratique constante qui a fixé les contours de la réparation en droit international des droits de l’Homme.

Le comité des droits de l’Homme et la Commission Africaine n’échapperont pas à l’influence du droit international général et ce, malgré le défaut de base  conventionnelle.

 

Para. II:          Une pratique jurisprudentielle dépourvue de base conventionnelle dans les systèmes Onusiens et Africains

Les cadres Onusiens et Africains partagent la particularité d’être des mécanismes quasi-juridictionnels. La nature même de ces mécanismes peut expliquer, dans une large mesure, la non consécration dans leur traité de base des modalités de réparation et l’absence d’un régime de responsabilité. Pourtant, le Comité des Droits de l’Homme comme la Commission Africaine ont eu à consacrer dans la pratique la restitutio in integrum comme modalité de réparation.

 

A) La pratique audacieuse du Comité des Droits de l’Homme          

Le Comité des Droits de l’Homme ne dispose pas d’un pouvoir juridictionnel stricto sensu au sens organique du terme. Mais il n’en demeure pas moins que l’examen des communications individuelles, l’instruction contradictoire des plaintes, l’existence de conclusions motivées et la référence faite au précédent sans oublier l’adjonction d’opinion des membres ont fini par imprimer au comité un caractère juridictionnel. Les positions qu’il dégage à travers ses constatations alimentent le contentieux international des droits de l’Homme.

Pourtant, il est aisé de constater le silence du pacte international relatif au droit civil et politique (16 décembre 1966) et de son protocole facultatif quant aux modalités de réparation. C’est en l’absence de toute habilitation conventionnelle que le comité consacre un régime de réparation dans la pratique. Cette position puise sa légitimité dans le droit international général et le comité des droits de l’Homme s’approprie des principes jurisprudentiels dégagés en matière de réparation. Cette prérogative pourrait aussi découler de l’article 2 §3 du Pacte consacrant le droit au recours utile.

Ainsi, il ressort de la jurisprudence du comité que « la victime d’une violation des dispositions de l’article 17 paragraphe 1er en corrélation avec le paragraphe 1er de l’article 2, a droit à réparation ». Et le comité de poursuivre son raisonnement en préconisant l’abrogation des articles criminalisant l’homosexualité dans le code pénal de Tasmanie. Cette abrogation constituerait, selon le comité, une réparation effective[16]. Il s’agit là d’une mesure de réparation non pécuniaire à la forme de restitutio in integrum. Ceci est d’autant plus prouvé que le comité n’hésite pas de préconiser la réouverture d’une procédure judiciaire interne, lorsqu’il constate la violation du droit à un procès équitable. Il en a été ainsi dans une série d’affaires dans lesquelles la Jamaïque avait méconnu les garanties élémentaires du procès équitable. Dans ces différentes affaires concernant la Jamaïque les auteurs des communications avaient été condamnés à mort. Mais le comité ayant conclu à la violation du droit à la vie, avait estimé que la libération constituerait une réparation appropriée.

Auparavant,  le comité avait déjà adopté un tel raisonnement dans sa constatation du 28 octobre 1981. Dans cette affaire opposant Violeta Setelich contre Uruguay le comité, après avoir constaté la violation du droit à un procès équitable recommanda que l’auteur de la communication soit jugé à nouveau et ce, dans le respect des garanties prescrites par l’article 14 du pacte[17].

Il apparaît au regard de cette jurisprudence que le comité donne à la restitutio in integrum toute sa vigueur et en fait un outil opératoire pour effacer les conséquences d’une violation du pacte et restaurer le statu quo ante. La Commission Africaine pourra-t-elle en faire autant en l’absence d’habilitation conventionnelle.

 

B) La décision 155/96 ou la timidité rompue de la Commission Africaine

des Droits de l’Homme.

La Charte Africaine des Droits de l’Homme reste muet sur la question de la responsabilité et son corollaire la réparation. Aucune de ces dispositions n’évoque la réparation. Cette lacune voulue et souhaitée par les hautes parties contractantes sera tardivement corrigée dans le protocole de Ouagadougou instituant une Cour Africaine des Droits de l’Homme dont l’article 27 ébauche un régime de réparation. Il s’y ajoute que contrairement au Comité des Droits de l’Homme qui s’est taillé une réputation d’organe autonome dégageant des positions faisant autorité, le Mécanisme Africain peine  à gagner son autonomie. Il demeure l’otage d’Etat jaloux de leur souveraineté. Ainsi, lorsqu’elle constate une violation, la Commission de Banjul se bornait purement et simplement, et dans la majeure partie des cas, à recommander des solutions sans en décliner des modalités pratiques de mise en oeuvre. Il en a été ainsi dans la décision 102/93 où la Commission après avoir constaté que l’interdiction frappant « The New » était une violation de l’article 9 relative à la liberté d’expression et d’opinions n’a préconisé aucune mesure individuelle ou collective. Il est évident que ce simple constat reste une satisfaction en droit international général. Mais, il demeure insuffisant pour réparer effectivement le dommage matériel découlant de la saisie des milliers d’exemplaires de magazines dont le « News Magazine ».

Plus surprenant sera le silence de la commission en ce qui concerne cette question dans le dispositif de la décision. En effet, la commission proposa une solution partielle dans son dispositif en recommandant au gouvernement Nigérian « de prendre des dispositions nécessaires pour aider les personnes mises aux arrêts au moment de l’annulation des résultats des élections et dédommager ces victimes »[18].

Pourtant, elle aurait pu recommander la libération des personnes arrêtées en méconnaissance de l’article 6 de la Charte Africaine et la validation des élections annulées par le gouvernement Nigérian en violation de l’article 13.1 relatif à la liberté de participer à la direction des affaires publiques. Ceci aurait constitué une solution équitable et conforme au droit international des droits de l’Homme en ce qu’elle réalise la restitutio in integrum.

Cette démarche déroutante et incohérente de la commission africaine, quoique surprenante n’en demeure pas mois justifiée par l’absence de base conventionnelle de la réparation dans la charte africaine des droits de l’Homme et des peuples. Aussi, la caractère quasi juridictionnel du mécanisme africain ajouté à un contexte politique contraignant confinent les Commissaires dans l’exercice d’un pouvoir minimum qui affecte la qualité des décisions rendues.

Toutefois, il est aujourd’hui établi que la Commission africaine amorce une ligne jurisprudentielle plus audacieuse en matière de réparation des préjudices subits par les victimes de violations de la Charte africaine. La décision 151/96 du 15 Novembre 1999,Civil liberties organisation c/Nigeria, en est une parfaite illustration. En effet, dans cette affaire le l’Etat nigérian avait procédé à des arrestations de civils et militaires présumés coupables de complot visant à renverser le gouvernement fédéral. Ces personnes, détenues dans des camps militaires sans nourriture suffisante, sans possibilité de voire leurs familles et de présenter leurs défenses encore moins d’accéder à un avocat de leur choix, seront traduites en secret devant des tribunaux spéciaux institués par décret. Ces tribunaux spéciaux restaient soumises à des clauses dérogatoires qui rendaient leur décisions insusceptibles  de tout appel devant les autorités judiciaires. La Commission saisie, avait alors conclu à la violation des articles 5 relative à l’interdiction des traitement cruel, inhumain et dégradant,  7 ayant trait au respect  des règles du procès équitable et 26 portant sur le principe de l’indépendance des tribunaux. Ainsi,  avait-elle recommandé au gouvernement nigérian « d’accorder aux inculpés la possibilité d’être jugé de nouveau par un tribunal civil ; qu’ils aient accès aux défenseurs de leur choix  et d’améliorer leurs conditions de détention ». La mise en œuvre d’une telle recommandation par le Nigeria  anéantirait toutes les décision prises par les tribunaux spéciaux en méconnaissance des articles 5, 7 et 26 de la charte et aboutirai à un réexamen des affaires dans le respect des règles du procès équitable et de l’indépendance des tribunaux.

Cette lignée jurisprudentielle sera confirmée avec vigueur dans la décision 155/96 de la 30ème session d’octobre 2001. Dans cette affaire, La commission avait invité gouvernement Nigérian à « réinstaller les victimes de raids menés sur ordre du gouvernement et de procéder au nettoyage total des terres et rivières polluées / endommagées par les opérations liées à l’exploitation pétrolière ». Cette recommandation remetrait le peuple Ogoni, évincé par le Gouvernement nigérian en méconnaissance notamment  des articles 14 relative au droit de propriété, 21 portant sur le   droits des peuples à disposer de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, 16 consacrant le droit à la santé et 24 ayant trait au droit à un environnement satisfaisant et global,  dans la situation aussi proche de celle dans laquelle  il se trouvait avant les agissements de « Shell Petroleum  Developement Corporation (SPDC)  .

Ces mesures consacrent de façon implicite la restitutio in integrum. Cette décision amorce une ligne jurisprudentielle qui rompt le silence de la commission. Il est vrai que la commission qui intègre le régime de réparation par effraction dans le Droit Africain des Droits de l’Homme opère une certaine révolution silencieuse favorisée par le contexte de démocratisation des systèmes politiques africains. Cette décision est d’autant plus spectaculaire que la Commission Africaine institut l’obligation d’étude d’impact environnemental avant l’installation de certains projets. Ce qui constitue une  mesure futuriste destinée à réaliser l’obligation de non répétition.

En définitive, le système africain consacre timidement la restitutio in integrum comme modalité de réparation.

Toutefois, elle ne dispose pas des mêmes pouvoirs que le juge de Strasbourg et son homologue interaméricain dont les approches restes divergentes.

 

SECTION II :Des approches divergentes quant à l’étendue des pouvoirs du juge

international des droits de l’Homme.

La primauté théorique du principe de restitutio in integrum reste incontestable dans le contentieux international des droits de l’Homme. En effet, si elle n’apparaît pas dans la motivation des arrêts, elle résulte de leur dispositif. Et si elle n’est pas expressément consacrée comme dans les cadres européens et interaméricain, elle fait l’objet d’appropriation implicite.

Mais, comme l’a si bien écrit Marc-André Eissen « c’est dans le droit, dans l’action des juges indépendants qui savent, comprennent et expliquent le droit, que réside la plus sûre garantie de la protection des droits de l’Homme ».

Par conséquent, c’est de l’étendue des pouvoirs du juge international des droits de l’Homme dont dépend l’effectivité du principe de restitutio in integrum. A ce niveau les pratiques sont loin d’être uniformes car l’étendue des pouvoirs du juge peut varier d’un mécanisme à un autre. Il ressort généralement du contentieux international des droits de l’Homme l’affrontement entre une tendance « minimaliste » reconnaissant des pouvoirs presque résiduels du juge (Para I) et une propension « maximaliste » lui offrant des pouvoirs pléniers (Para II).

 

Para. I :  La tendance « minimaliste » et classique du juge européen des droits de l’Homme.

En réalité cette tendance minimale reste fondamentalement incarnée par la Cour de Strasbourg même si la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples ne s’en écarte pas. Elle semble tirer toute sa légitimité du droit international classique fortement dominé par une conception rigoriste de la souveraineté des Etats et réfractaire à toute idée d’une justice internationale supranationale. Il découle d’une telle approche que les pouvoirs du juge ne peuvent être que résiduel (A) alors que l’Etat dispose d’une large marge d’appréciation (B).

A)        Des pouvoirs résiduels et subsidiaires

L’article 41 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme confine les pouvoirs du juge de Strasbourg dans un cadre étroit. Il traduit la vision de certains auteurs classiques au rang desquels figure Dionisio Anzilotti qui soutenait « que le droit international ne fixe pas en principe, les moyens avec lesquels l’Etat doit assurer l’exécution de ses devoirs … ».

Ainsi, lorsqu’elle constate une violation, la cour n’a, en droit, aucune compétence pour ordonner la restitutio in integrum. Et même dans les cas où elle considère que celle-ci peut constituer une modalité de réparation, elle reste muette quant à sa forme et son contenu. La Cour de Strasbourg opte en réalité pour un raisonnement in abstracto qui ne se soucie pas des dispositions que l’Etat doit prendre pour réaliser la restitutio in integrum. Elle considère « qu’elle n’a ni la compétence, ni la possibilité d’accomplir la restitutio in integrum par elle même[19].

La Cour de Strasbourg interprète ses pouvoirs de manière restrictive conformément aux dispositions de l’article 41 de la convention européenne, à la volonté des hautes parties contractantes et à l’esprit du système Européen qui repose sur le principe de subsidiarité. Il va de soi que cette attitude du juge européen vide le principe de restitutio in integrum de toute sa valeur opératoire. Pourtant, il aurait fallu s’appuyer sur l’obligation des Etats de se conformer aux arrêts de la cour (Article 46) et à la finalité du contentieux de la responsabilité qui reste la réparation juste et équitable pour opérer un raisonnement in concreto. Mais la Cour de Strasbourg semble développer une conception objective de la réparation, laquelle reste marquée du sceau de l’inter étatisme. La compétence du juge européen en matière de restitution in integrum n’est que secondaire, car subordonnée à une intervention première et sans succès de l’Etat.

Dès lors, la restitutio in integrum ne s’applique pas de façon autonome et systématique en droit Européen des Droits de l’Homme. Sa mise en œuvre dépend largement de la volonté et de l’appréciation des Etats.

 

B)        Une large marge d’appréciation étatique

Dans le système Européen, la responsabilité première de réaliser la réstitution incombe à l’Etat. En effet, il lui appartient de tirer les conséquences de la violation constatée par la Cour de Strasbourg. L’Etat dispose d’un pouvoir discrétionnaire quant à l’opportunité de la réparation et le libre choix des moyens. Il ressort de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg que « les Etats contractants, parties à une affaire sont, en principe, libres de choisir les moyens dont ils useront pour se conformer à un arrêt constatant une violation »[20] . Il en résulte que les Etats sont dotés d’un véritable pouvoir d’appréciation quant aux modalités d’exécution.

Cette position qui tire sa légitimité d’une interprétation littérale et stricte de l’article 41 s’inspire des « clauses figurant dans les traités internationaux de type classique tels l’article 10 du Traité Germano-Suisse d’arbitrage et de conciliation de 1921 et de l’article 32 de l’Acte Général de Genève pour le règlement pacifique des différends internationaux de 1928 … »[21]. Le principe de libre choix des moyens apparaît aussi dans la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice notamment dans l’affaire du mandat d’arrêt du 11 avril 2000 où la Belgique était appelée, « par les moyens de choix, à mettre à néant le mandat d’arrêt du 11 avril 2000 ». Seulement, lorgane judiciaire principale de l’ONU n’est pas restée muette sur les modalités et la finalité de la réparation, l’Etat étant tenu d’anéantir le mandat d’arrêt ce qui permet d’en effacer les conséquences. Ainsi, La Cour Internationale de Justice n’offre aucune porte de sortie à l’Etat Belge qui ne pourra invoquer son droit interne pour s’amender de l’obligation qui lui incombe en vertu de l’arrêt précité.

Il est évident que la Cour Européenne des Droits de l’Homme donne à l’Etat et à la victime la possibilité d’un règlement à l’amiable avant d’intervenir pour la satisfaction équitable. A cet effet, Il est même arrivée que la solution se soit rapprochée d’une véritable restitutio in integrum. Ce fut le cas dans l’affaire Vogt contre l’Allemagne où la requérante s’est vu réintégrer dans la fonction publique de son pays en recevant ses indemnités de manière rétroactive sur la base de l’arrêt du 26 septembre 1995 qui avait constaté la violation. D’ailleurs dans son arrêt sur la satisfaction équitable du 02 septembre 1996, le juge de Strasbourg estima que l’accord à l’amiable revêtait un caractère équitable et décida de la radiation de l’affaire  du rôle. Ce dernier arrêt prouve que la subsidiarité peut bien conduire à la satisfaction des requérants. Mais poussée à l’absolue, elle débouchera sur l’arbitraire.

Pour éviter les dérives étatiques, le système Européen, se fondant sur le principe de solidarité, a instauré un mécanisme de « monitoring »  assuré par le comité des ministres qui exerce un contrôle à posteriori sur les mesures adoptées par les Etats après un constat de violation. Le comité prend ainsi des résolutions intérimaires pour suivre l’état d’avancement de l’exécution des arrêts ou des résolutions finales pour entériner une solution définitive. Le comité des ministres reste un rempart contre l’arbitraire des Etats doté d’un pouvoir discrétionnaire. Il peut être amené à examiner, conformément à la Règle n°3,  et « compte tenu du pouvoir discrétionnaire dont l’Etat concerné dispose en ce qui concerne le choix des moyens nécessaires pour se conformer à l’arrêt, si les mesures individuelles pour assurer que la violation a cessé ont été prises et que la partie lésée ait été remise, pour autant que possible, dans la situation antérieure à la violation … ». Ce pouvoir d’appréciation de la restitutio in integrum, par un organe politique, pose des problèmes sérieux d’autonomie du juge Européen et de dédoublement fonctionnel. Pourtant, il aurait fallu que la cour se prononce clairement sur les mesures à prendre pour réaliser la restitutio in integrum pour permettre au comité, sans même la concurrencer, d’exercer son  contrôle à postériori.

Le minimalisme Européen qui inspire la Commission Africaine ne semble être de mise ni dans le système interaméricain, ni dans le cadre Onusien où le juge dispose d’une compétence plus large.

 

Para. II :         La propension “maximaliste” du juge interaméricain

            La question de la réparation occupe une place fondamentale dans le système interaméricain en raison de l’utilisation dont elle fait l’objet et du contenu qui lui est assigné. Certes le juge interaméricain des droits de l’Homme s’inspire du classicisme en consacrant le principe selon lequel la responsabilité de l’Etat pour violation des droits de l’Homme est une responsabilité internationale[22].

Mais il va au-delà dans la pratique en raison de la compétence plénière de la Cour Interaméricaine (A) qui reste l’expression d’une conception progressiste (B).

 

A)        La compétence plénière de la Cour Interaméricaine

A la conception objective reposant sur la notion d’ordre public international des droits de l’Homme consacrée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, la Cour Interaméricaine ajoutera une approche subjective et très civiliste de la réparation. En effet, le contentieux interaméricain des droits de l’Homme considère la réparation comme un droit de la partie lésée alors que la Cour de Strasbourg en fait une « obligation de l’Etat ». Il en découle que contrairement au juge Européen qui fait de la restitutio in integrum une simple faculté abandonnée à la discrétion de l’Etat, le juge interaméricain s’arroge le pouvoir d’ordonner in concreto des mesures destinées à restaurer le statu quo ante.

Les pouvoirs du juge interaméricain en matière de réparation aussi larges soient-ils, s’inspirent de l’article 63.1. Il résulte dudit article que « lorsqu’elle reconnaît qu’un droit ou une liberté protégé par la présente convention ont été violés, la cour ordonnera que soit garantie à la partie lésée la jouissance du droit ou de la liberté enfreint. Elle ordonnera également, le cas échéant, la réparation des conséquences de la mesure ou de la situation à laquelle a donné lieu la violation de ces droits et le paiement d’une juste indemnité à la partie lésée. ».

Au regard de cette disposition, unique dans ses termes comme dans les pouvoirs qu’elle consacre en droit international des droits de l’Homme, la Cour Interaméricaine dispose d’une très grande latitude en matière de réparation. D’ailleurs, elle n’hésite pas à ordonner des mesures de restitutio in integrum. Ainsi, dans son arrêt du 10 septembre 1993, Aloeboetoe contre Surinam (réparation) le juge interaméricain a poussé le courage jusqu’à ordonner à l’Etat condamné la réouverture, dans le village des victimes, d’une école et d’un dispensaire. Il en est de même, lorsqu’il constate la violation du droit à un procès équitable. Dans ce dernier cas, la cour n’a pas hésité à ordonner la restauration du statu quo, c’est-à-dire la réouverture des procédures judiciaires internes aux fins d’établir un nouveau jugement conforme aux exigences de respect des garanties d’un procès équitable[23]. L’on constate que la question de la réparation ne reste suspendue à aucune condition interne.

Le Comité des Droits de l’Homme semble aussi s’inscrire dans la même logique. Il a été noté que dans plusieurs affaires concernant la Jamaïque et relatives au droit à un procès équitable et mettant en cause le droit à la vie, le comité, après avoir constaté une violation de l’article 6 du pacte avait retenu la libération des victimes comme étant la modalité de réparation la plus appropriée[24] et préconisa, chemin faisant, la réouverture des procès entachés d’irrégularité.

En somme, le contentieux interaméricain est un lieu d’exercice de compétence plénière en matière de réparation. Il sème les germes d’une rupture et offre des perspectives progressistes.

 

B)        L’expression d’une conception progressiste

Le courage et l’audace du juge interaméricain en matière de réparation intégrale ne relèvent pas d’un tâtonnement. Mais, ils découlent d’une volonté d’implanter durablement un régime de réparation efficace au profit des victimes. L’article 63.1 qui constitue le siège de cette volonté détache le droit de la réparation du droit interne des Etats. Le juge interaméricain considère que le dispositif de réparation mis en place par l’article 63.1 reste autonome par rapport au droit interne[25]. Cette position est d’autant plus confirmée que la cour imposera au Honduras un délai impératif de 90 jours pour exécuter l’arrêt ordonnant des mesures de réparation dans l’affaire Velasquez du 21 juillet 1989. Il faudra attendre jusqu’en 1991 pour voir la Cour Européenne s’approprier la pratique du délai impératif d’exécution de trois mois dans l’affaire Oliveira de Azevedo contre Portugal.

Il ressort généralement des pratiques du juge  interaméricain que le principe de restitutio in integrum reste la pierre angulaire de la réparation. Ce principe structure tout le régime de la réparation car il prévaudra sur toute autre forme de réparation à chaque fois que sa réalisation restera possible. Mais il s’avère que la restitutio in integrum demeure difficile à mettre en œuvre dans le contentieux international des droits de l’Homme.

 

CHAPITRE II :

 De la difficile mise en œuvre du principe de restitutio in integrum

Si la primauté du principe de restitutio in integrum ne souffre d’aucune remise en cause théorique dans le contentieux international des droits de l’Homme, sa mise en œuvre se heurte à des contraintes qui en affectent la portée. Ces contraintes peuvent être inhérentes au principe lui même en raison de l’étroitesse de son champ d’application (Section I). Aussi, il existe des obstacles extrinsèques résidant dans des facteurs intra-étatiques (Section II).

 

SECTION I : L’étroitesse du champ d’application

De toutes les modalités de réparation retenues en droit international général comme dans le contentieux international des droits de l’Homme, la restitutio in integrum apparaît comme celle qui correspond le plus à l’impératif de justice. Elle permet de réaliser une réparation juste et équitable car elle ne fait que remettre les parties au statu quo ante en restaurant la situation qui aurait prévalu si la violation n’était pas intervenue.

Par conséquent, la restitutio integrum constitue une technique de réparation dont le but ultime est de placer la victime d’une violation dans une situation telle qu’elle ne puisse s’enrichir au détriment de l’Etat défendeur encore moins s’appauvrir à son profit.

Pourtant, malgré ses vertus et la consécration de sa primauté dans le contentieux international des droits de l’Homme, la restitutio in integrum reste un principe d’application sélective (Para I) qui révèle des insuffisances dans la pratique (Para II).

 

Para. I :          Un principe d’application sélective

La remise des choses dans l’état où elles se trouvaient avant la survenance de l’acte ou du fait internationalement illicite est loin d’être facile. Le droit international général s’est heurté à cette difficulté et le contentieux international des droits de l’Homme n’y échappera guère.

En effet, le principe de restitutio in integrum ne s’applique pas de façon automatique et systématique. Sa réalisation reste tributaire de la nature du dommage d’une part (A). D’autre part, il demeure très difficile d’en apprécier la faisabilité dans la pratique (B).

 

A)               Des contraintes liées à la nature du dommage

C’est de la nature du dommage que dépend fondamentalement le choix des modalités de réparation. La restitutio in integrum n’intervient en principe qu’en cas de dommage matériel. D’ailleurs, La cour européenne comme le juge interaméricain des droits de l’Homme n’abordent les questions y afférentes que dans la partie de l’arrêt consacrée au traitement du dommage matériel. Cette technique de réparation demeure en principe inopérant dans le cadre d’un dommage moral. Elle demeure inappropriée dans ce domaine. En effet, la remise des choses au statu quo ante suppose des opérations concrétes alors que le dommage moral relève en général du domaine de l’abstrait. Ceci est d’autant plus manifeste que la Cour Européenne des Droits de l’Homme considère « que le constat de violation de la convention constitue en soi une satisfaction équitable suffisante pour le dommage moral … »[26].

De même, la restitutio in integrum ne saurait être retenue lorsque l’acte ou le fait constitutif de violation a déjà produit des effets irréversibles ou lorsqu’il en résulte des dommages définitifs. La Cour Européenne des Droits de l’Homme a exprimé cette position dans l’affaire De Wilde, Ooms et Versyp contre Belgique où les requérants avaient déjà subi des internements pour les délits de vagabondage et de mendicité[27].

En effet, dans cette affaire, le juge de Strasbourg a estimé qu’il était impossible de réaliser une restitutio in integrum. Il considéra en l’espèce « que ni le droit interne belge, ni du reste aucun autre système juridique concevable, ne sauraient permettre d’effacer les conséquences du fait que les trois requérants n’ont pas disposé du droit garanti par l’article 5. para.4 ».

Par ailleurs, le rapport Van Boven va plus loin en énumérant les droits et libertés pouvant faire l’objet de restitutio in integrum. Il résulte de la lecture dudit rapport qu’il y aura lieu de « rétablir, entre autre, le droit à la liberté, à la citoyenneté ou à la résidence, à l’emploi ou à la propriété »[28].  Cette énumération n’est pas  exhaustive, mais elle reste assez édifiante sur l’étroitesse du champ d’application de la restitutio in integrum dont l’appréciation de la faisabilité se révèle difficile dans la pratique.

 

B)        La difficile appréciation de la faisabilité par le juge international

La problématique de la mise en œuvre de la restitutio in integrum suppose le plus souvent une appréciation de sa faisabilité technique au plan interne. Or, le juge international des droits de l’Homme n’a pas le pouvoir ni la compétence de se saisir des questions de droit interne. Sa perception de l’environnement interne des Etats mis en cause demeure très limité. Ainsi, part-il du principe de libre choix des moyens même s’il ordonne la restitutio in integrum dans le cadre interaméricain et Onusien.

C’est ainsi que la Cour Européenne des droits de l’Homme fut amenée à constater dans l’affaire ex-Roi de Grèce et autres C. Grèce que même « si la nature de la violation permet une restitutio in integrum, il incombe à l’Etat défendeur de la réaliser, la cour n’ayant ni la compétence ni la possibilité pratique de l’accomplir elle-même ». L’intervention du juge de Strasbourg reste subordonnée au refus ou l’à l’incapacité de l’Etat défendeur à effacer les conséquences de la violation en remettant les parties dans la situation antérieure à la violation.

Par conséquent, l’appréciation de la faisabilité des mesures de restitutio in integrum  dépend exclusivement de l’ordre interne alors que le juge interaméricain ordonne lesdites mesures sans même en  tenir compte . Cette attitude de la Cour fut-elle audacieuse n’en demeure pas moins hypothétique quant à la force exécutoire de l’arrêt ordonnant la remise des choses au statu quo  ante

Pourtant, l’impératif d’efficacité aurait commandé que l’environnement et l’état  du droit interne de l’Etat responsable puissent  servir au juge interaméricain d’élément d’appréciation. Ceci est d’autant plus nécessaire que l’arrêt ordonnant la restitutio in integrum est destiné à modifier effectivement la situation de son destinataire dans l’Etat. Une telle  action ne peut reposer que sur le droit interne et sur les capacités réelles de l’Etat dont la responsabilité est retenue.

A ce niveau, le juge Européen, malgré la faiblesse pratique de son dispositif normatif en matière de restitutio in integrum semble plus cohérent que son homologue interaméricain. En effet, la Cour de Strasbourg poursuit la logique de subsidiarité jusqu’à demander à l’Etat défendeur de choisir entre la restitutio in integrum et le versement d’une indemnité. La logique d’efficacité justifie, dans une large mesure, ce rapport alternatif que la cour semble développer entre les différentes modalités de réparation. Cette position est d’autant plus intéressante que la restitution in integrum peut soulever une question de faisabilité financière voire sociale. A cet effet l’article 35 du projet de la Commission du Droit International relatif à la responsabilité internationale est une parfaite illustration. Il exclut la restauration du statu quo ante lorsqu’elle impose à l’Etat « une charge hors de toute proportion avec l’avantage qui dériverait de la restitutio plutôt que de l’indemnisation ». 

Il s’agit là d’un bilan coût / avantage dans l’usage des modalités de réparation qu’une cour internationale, fut-elle la plus puissante, aurait du mal à apprécier en lieu et place de l’Etat mis en cause.

Cependant, la difficulté d’apprécier la faisabilité de la restitutio ne saurait exonéré le juge international des droits de l’Homme. Celui-ci doit exercer ses pouvoirs en connaissance de cause, notamment par le biais de l’enquête et de l’évaluation afin de pouvoir dire le droit. Ce qui suppose une analyse au cas par cas sans quoi le principe de restitutio in integrum serait vidé de son sens et dépouillé de toute sa portée pour demeurer dans une insuffisance pratique.

 

Para. II :         Des insuffisances pratiques de la restitutio in integrum

Avec un champ d’application aussi étroit et des conditions de mise en œuvre hypothétiques, la restitutio in integrum s’avère insuffisante dans la pratique. Ainsi, si sa primauté théorique ne peut être contestée, sa valeur opératoire reste très faible. La restitutio in integrum n’est pas une modalité absolue encore moins plénière dans la pratique (A). L’analyse du contentieux international des droits de l’Homme révèle même une prépondérance de fait du contentieux indemnitaire (B).

 

A)        Du caractère non exclusif

La primauté théorique du principe de  restitutio in integrum n’est pas absolue. L’une des limites objectives dudit principe réside dans le fait qu’il ne peut réaliser l’entière satisfaction à la victime dans tous les cas où il serait retenu par le juge. En effet, il arrive très souvent que la restitutio integrum n’efface les conséquences de l’acte dommageable que de façon partielle et imparfaite.

Ainsi, il résulte de l’article 34 du projet de la Commission du Droit International relatif à la responsabilité des Etats pour faits internationalement illicites que « la réparation intégrale du préjudice causé par le fait internationalement illicite prend la forme de restitution d’indemnisation et de satisfaction, séparément ou conjointement ». Il découle de cet article qu’une modalité de réparation ne peut se prévaloir de son autonomie que lorsqu’elle produit par elle seule plein effet en réalisant parfaitement la réparation au profit de la victime. L’article 63.2 de la Convention Interaméricaine ne s’écarte pas de cette vision. En effet, elle autorise le cumul de la restitutio in integrum et des autres formes de réparation notamment l’indemnisation, la satisfaction et la cessation de la violation. Il en était ainsi dans l’affaire Aloeboetoe où le juge interaméricain combinera des mesures destinées à restaurer le statu quo ante (réouverture d’une école et d’un dispensaire) au versement d’indemnité aux ayant droits des victimes. La cour a même estimé dans cet arrêt que « As for the various forms and modalities of effecting such reparation, on the other hand, the rule of in integrum restitutio refers to one way in wich it must be redressed, for in certain cases such reparation may not be possible, sufficient or appropriate[29]. La Cour Interaméricaine considère, dans cette affaire la restitutio in integrum comme une modalité de réparation parmi tant d’autres. A cet effet, elle pourra être complété en cas d’insuffisances ou remplacée lorsqu’elle s’avère inappropriée. 

Le raisonnement de la Cour Interaméricaine dans l’arrêt Aloeboetoe part du simple constat de l’insuffisance et de du caractère très souvent inapproprié de la restitution in integrum. En l’espèce, il était impossible de restaurer le droit à la vie en ressuscitant les personnes exécutées par l’Etat du Surinam (forces armées). Dès lors, la cour en a conclu, dans le paragraphe 50 de l’arrêt, que « in such cases, reparation must take other, alternative forms, such as pecuniary compensation ». Elle décida alors de verser aux ayant droits des victimes des indemnités compensatoires au titre de mesures individuelles.

La Commission Africaine semble s’inscrire dans cette lancée même si elle ne dispose pas des pouvoirs équivalents à ceux de la Cour Interaméricaine. La décision 155/96 en est la plus parfaite illustration. En effet, dans cette décision, la Commission Africaine a exhorté l’Etat Nigérian de procéder à la fois au nettoyage des terres polluées par la « National Petroleum Company (NNPC) », à la réinstallation des victimes de raids. Ces deux mesures rentrent dans le cadre la restitutio in integrum. Elles seront complétées par le  versement d’une compensation adéquate requis par la Commission dans cette même décision.

Par conséquent, l’analyse du contentieux international des droits de l’Homme révèle que la restitutio in  integrum est concurrencée par les autres modalités de réparation. Ce constat est d’autant plus vraie que l’analyse quantitative du contentieux international des droits de l’Homme laisse apparaître la prépondérance de fait de la réparation pécuniaire.

 

B)        De la prépondérance de fait du contentieux indemnitaire

« L’argent est la mesure de la valeur des choses »[30]. Cette affirmation de Grotuis semble être tombé dans l’oreille du juge de Strasbourg. Ce dernier semble plus prompt à ordonner une réparation pécuniaire qu’à prononcer des mesures de restitutio in integrum. Dans le contentieux Européen des droits de l’Homme, l’indemnisation reste la forme la plus fréquente de réparation.

D’ailleurs, le juge de Strasbourg ne dispose de réelles libertés et d’autonomie en matière de réparation que dans le domaine des indemnités compensatoires. Il use des pouvoirs que lui confère l’article 41 pour fixer le montant exact des indemnités et les assortir d’intérêts moratoires. Il s’agit là d’un pouvoir de restreindre la liberté de l’Etat défendeur. Ce dernier reste soumis à un délai impératif de trois (3) mois. Il en a été ainsi dans l’affaire Hentrich c. la France où la cour a condamné l’Etat défendeur à verser une indemnité de 800.000 Francs Français dans les trois (3) mois.

La Cour de Strasbourg ira plus loin dans l’affaire Vermeire du 4 octobre 1993 en ordonnant le paiement d’intérêts légaux sur la somme attribuée au titre de la réparation du dommage matériel à compter de la date de prononcé de l’arrêt. Le juge de Strasbourg  qui ne dispose que de pouvoirs subsidiaires en matière de restitutio in integrum ne ratera pas la seule occasion de prouver le caractère obligatoire de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Son attitude en matière de réparation pécuniaire est d’autant plus préoccupante qu’il alloue quelquefois des intérêts moratoires dépassant de loin le montant prescrit au titre de réparation du dommage. Il en a été ainsi dans l’arrêt Vermeire où la somme affectée aux intérêts légaux aux fins de réactualisation du dommage avait atteint 12 millions de Francs Belges alors que celle consacrée au dommage matériel  ne s’élevait qu’à 9 millions.

Ce constat ne correspond pas à l’impératif de satisfaction juste et équitable assigné à la réparation. La position du juge Européen peut être inquiétante quant on sait que les droits de l’Homme posent généralement et fondamentalement la problématique de la dignité humaine dans tous ses aspects. En effet, dans le domaine des droits humains le principe « violeur, payeur » ne saurait prévaloir sur les autres formes de réparation. Car cela participerait de la « banalisation du contentieux indemnitaire »[31]etde l’affaiblissement de  «  de l’ordre public international des droits de l’homme ».

Pourtant, c’est cette voie que semble emprunter le juge interaméricain qui utilise très souvent le paiement des indemnités à la place ou avec la restitutio in integrum dont l’effectivité demeure aussi problématique au plan intra-étatique.

 

SECTION II : De la problématique de l’effectivité des mesures de restitutio in integrum au plan intra-étatique

Le contentieux international des droits de l’Homme a hérité des pathologies du droit international général relatives à la réception des normes et obligations qui en découlent dans l’ordre interne. A ce sujet, Dionisio Anzilotti faisait remarquer « que le droit international ne fixe pas en principe, les moyens avec lesquels l’Etat doit assumer l’exécution de ses devoirs. Ces moyens sont en fait tellement intimement liés à l’organisation interne des Etats que le droit international ne peut pas les déterminer sans envahir un domaine qui lui est tout à fait interdit ». cette conception rigoriste de la souveraineté reste l’expression du droit international dans un contexte différent de celui qu’on connaît aujourd’hui. Le droit international des droits de l’Homme appliqué par des juridictions supranationales reste incompatible avec une telle conception des rapports entre l’ordre interne et les obligations internationales.

Pourtant, dans la pratique, le droit international des droits de l’Homme se heurte très souvent à la souveraineté des Etats. Le contentieux international des droits de l’Homme est un champ de prédilection du conflit entre les deux ordres interne et externe. Il résulte de ce conflit que les mesures de restitutio in integrum prononcées par le juge sont très souvent paralysées par la défaillance du relais étatique (Para II) et ce, malgré la dynamique de suivi de l’exécution des arrêts au plan interne (Para II).

 

Para. I :          De la défaillance du relais étatique

De toutes les modalités de réparation, la restitutio in integrum reste celle qui nécessite le plus de coopération avec l’Etat pour sa réalisation. Son efficacité dépend essentiellement des moyens dont dispose l’Etat à cet effet. Les juridictions internationales n’ont en principe ni les pouvoirs ni les compétences de fixer les moyens par lesquels l’Etat doit donner effet aux mesures ordonnées au titre de restitutio in integrum.

On aurait pu penser que les Etats ayant manifesté leur consentement à être liés par une convention internationale des droits de l’Homme prendraient systématiquement leur disposition pour donner effet aux obligations qui en découlent. Mais,  tel n’est pas le cas en réalité car à l’intérieur des Etats, existent des obstacles institutionnels empêchant très souvent l’exécution des arrêts en général et des mesures de restitutio in integrum en particulier (A). Il s’y ajoute que la restitutio in integrum oblige, très souvent, les Etats à opérer un arbitrage complexe (B).

 

            A)        Des obstacles institutionnels

Les Etats sont en principe tenus de se conformer aux arrêts et décisions des juridictions internationales des droits de l’Homme. Il s’agit là d’une obligation à caractère juridique et non d’un simple vœu pieux encore moins d’un souhait. Cette obligation prescrite par l’article 46 de la Convention Européenne se trouve aussi au cœur du système interaméricain. L’article 68.1 de la Convention de San José de Costa Rica exprime de manière claire et sans ambages que « les Etats parties à la présente convention s’engagent à se conformer aux décisions rendues par la cour dans tout litige où ils  sont en cause. ».

La Convention de Ouagadougou s’engage dans la même perspective en y intégrant l’obligation de l’Etat d’agir dans les délais fixés par la cour. Cette obligation de l’Etat ne se manifeste que par la paiement d’une indemnité, la cessation de la violation et la restitutio in integrum. A cet égard, la Cour Européenne considère « qu’un arrêt constatant une violation entraîne pour l’Etat défendeur l’obligation juridique au regard de la convention de mettre un terme à la violation et d’en effacer les conséquences de manière à rétablir autant que faire se peut la situation antérieure à celle-ci »[32].

Ainsi, la réalisation du principe de restitutio in integrum impose aux Etats l’obligation de réexamen des affaires à la suite d’arrêts des différentes cours . Cette obligation suppose des réformes au plan interne car elle peut se heurter concrètement à l’autorité de la chose jugée ou aux lois et règlement en vigueur.

D’ailleurs c’est dans cette perspective que certains Etats européens se sont dotés d’un cadre juridique favorable à la réouverture consécutive à un arrêt de la Cours de Strasbourg. En revanche, le réexamen ne sera possible dans des Etats comme Chypre, Irlande, Roumanie et ce, dans le domaine pénal. Il en est de même dans une vingtaine d’autres Etats en matière civile 

Dans le cadre interaméricain, il est même arrivé que le Pérou entra en résistance contre la Cour. En effet, dans l’arrêt Castillo Petruzi contre Pérou du 30 mai 1999, la cour avait ordonné à l’unanimité la réouverture du procès avec toutes les garanties procédurales. Mais le Pérou opposa sa résistance au point de vouloir retirer immédiatement son acceptation de la clause facultative de juridiction obligatoire. L’on se rend compte de la faiblesse pratique du principe de restitutio in integrum dans le cadre interaméricain. Dans ce système, seuls la Colombie, le Costa Rica et le Pérou s’appuient actuellement sur des dispositions de droit interne pour garantir la mise en œuvre des arrêts de la cour[33].

Dans le système Onusien, le Comité des Droits de l’Homme n’hésite pas d’assurer lui même le suivi de ses propre constatations. Dans certains cas celles-ci sont suivies d’effet. Mais il ressort des travaux du rapporteur spécial chargé du suivi des constatations que des 253 cas de violation prononcés durant la période de 1979 à 1999, seul 30% des 152 réponses reçues ont abouti à l’adoption de mesures individuelles ou générales requises par le comité[34].

En définitive, l’effectivité d’une mesure de restitutio in integrum reste suspendue à des préalables institutionnels dans l’ordre interne. Aussi, elle demeure soumise à l’arbitrage étatique.

 

B)        De la complexité de l’arbitrage

La faisabilité des mesures de restitutio in integrum prononcées par le juge international des droits de l’Homme en cas de violation des libertés consacrées, ne peut être appréciée qu’à l’aune du droit interne et des capacités de l’Etat défendeur. Dans certains cas la restauration de la situation antérieure au fait internationalement illicite pourrait s’avérer non seulement complexe mais aussi coûteuse. Il en résulte que l’Etat est en réalité confronté à un problème d’évaluation, de disponibilité et de choix des moyens. Le juge international n’ayant en principe que la compétence de prescrire les mesures par lesquelles la restitutio in integrum devrait être réalisée.

Dès lors, il apparaît que l’attitude de la Cour Européenne, même si elle paralyse le plus le principe de la restitutio in integrum, demeure plus réaliste. En effet, la cour laisse à l’Etat un pouvoir discrétionnaire quant à l’appréciation de la faisabilité des mesures de restauration du statu quo ante. L’Etat aura une obligation de moyens à sa charge et pourra en fonction de sa capacité juger de l’opportunité ou non des mesures de redressements. Ainsi, dès que survint le constat de violation de la Convention Européenne, l’Etat devrait chercher à réparer les dommages matériels en essayant autant que faire se peut, d’effacer les conséquences de l’acte dommageable.

La Cour de Strasbourg va jusqu’à considérer que la révision d’un procès s’apparente à une mesure de restitutio in integrum. cette position participe d’une démarche conciliatrice entre la victime et l’auteur de la violation dès l’instant que le simple constat de violation reste infamant pour les hautes parties contractantes. En effet, la réparation ne revêtant pas un caractère punitif en droit international des droits de l’Homme, le règlement à l’amiable doit primer sur les voies purement contentieuses sous la seule réserve de l’équité et de leur homologation par les instances de Strasbourg. Cette démarche positive peut s’avérer aussi utile et efficace qu’on ne l’imagine.

Ainsi, dans l’affaire Vogt c Allemagne, les parties étaient parvenues à un règlement à l’amiable effaçant toutes les conséquences de l’acte dommageable grâce à la réintégration de la requérante dans la fonction publique et au paiement d’indemnités rétroactives. Le juge de Strasbourg s’en était réjouit en constatant que la réparation était juste et équitable. Par conséquent, il décida de la radiation de l’affaire du rôle dans la seconde phase de l’arrêt.

Cependant, on ne saurait faire l’apologie d’une telle démarche car abandonnant à l’Etat défendeur le pouvoir discrétionnaire quant à l’opportunité de la restitutio in integrum. Seulement, cette position de la Cour de Strasbourg semble d’autant plus pragmatique que le juge interaméricain qui dispose en principe d’un pouvoir d’ordonner à l’Etat la restauration du statu quo ante peut voire, dans beaucoup de cas, ses prescriptions non suivies d’effet dans l’ordre interne. Le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies et la Commission Africaine connaissent les mêmes difficultés. Le caractère exécutoire de leurs décisions restant très souvent tributaires de contraintes intra-étatique. C’est ce qui justifie la dynamique actuelle en faveur du suivi des décisions découlant du  contentieux international des droits de l’Homme.

 

Para II :          De la dynamique de suivi des décisions au plan interne

Les pratiques et réactions des Etats face à des mesures de restitutio in integrum sont fort diversifiées dans le contentieux international des droits de l’Homme. En effet, l’attitude des Etats semble s’inspirer de la souveraineté au mépris du principe de solidarité et en méconnaissance de leur obligation à se conformer aux arrêts et décisions du juge international des droits de l’Homme. Pourtant, des interpellations ne manquent pas et certains Etats prennent des dispositions de manière à donner effet aux arrêts des instances de protection des droits de l’Homme. Mais il faut noter que les solutions retenues jusque là n’étaient que pratiquement conjoncturelles dans le cadre africain, interaméricain et Onusien.

Par contre, en Europe, on s’est engagé dans une voie structurelle dont la résolution (R2000)2  reste la parfaite illustration (A). Cette avancée du système Européen n’empêchera pas au principe de restitutio in integrum de se heurter au bouclier étatique.

 

A)        La recommandation R(2000)2 ou la recherche de solutions structurelles et harmonisées.

Laisser à chaque Etat le pouvoir et la possibilité d’agir à sa convenance pour décider de l’opportunité des mesures de restitutio in integrum anéantirait, à la longue, la valeur primordiale de ces dernières et remettrait en cause l’équilibre établi sur la base du principe de solidarité. Pour éviter cette situation, le juge de Strasbourg a estimé que l’Etat a l’obligation, en vertu de l’article 46 de la convention, de se conformer à un arrêt de la cour. Par conséquent, il est tenu de payer une satisfaction équitable et d’adopter les mesures générales et individuelles nécessaires à la réalisation de la restitutio in integrum[35].

Le comité des ministres emboîtera le pas au juge de Strasbourg dans sa recommandation R(2000)2. Le comité constatera l’existence « de circonstances exceptionnelles dans lesquelles le réexamen d’une affaire ou la réouverture d’une procédure s’est avérée être le moyen le plus efficace, voire le seul pour réaliser la restitutio in integrum ». cette recommandation invite les Etats à prendre toutes les dispositions nécessaires à la mise en œuvre des arrêts de la Cour de Strasbourg.

Ainsi, il incombe aux parties contractantes de «  s’assurer qu’il existe au niveau interne des possibilités adéquates de réaliser, dans la mesure du possible, la restitutio in integrum »[36]. Les systèmes juridiques des Etats parties doivent intégrer une condition supplémentaire de réouverture ou de réexamen découlant naturellement d’un arrêt de la Cour de Strasbourg constatant une vilolation.

Cette recommandation conforte la position du juge Européen des droits de l’Homme qui a toujours décliné sa compétence quant au choix des moyens. En effet, le Comité des Ministres, organe politique du Conseil de l’Europe peut, dans le cadre des attributions qui lui sont conférées en matière de suivi, préconiser les moyens appropriés et adéquats de mise en œuvre des mesures de restitutio in integrum.

L’obligation de réouverture se situe entre l’arrêt constatant la violation et celui qui concerne la satisfaction équitable. Elle n’est ni générale ni absolue encore moins dotée d’une force obligatoire. Pourtant, la recommandation R(2000)2 influence aujourd’hui la pratique des Parties Contractantes.

Il faut d’ailleurs noter que les Etats membres de la Convention Européenne ont fourni beaucoup d’effort dans la perspective de respect et d’application des normes de droit international. Ainsi, pourrons-nous citer en guise d’exemple la Norvège qui dispose depuis les années 1969 d’un dispositif de réexamen couvrant l’ensemble des domaines civil, pénal et administratif.

La Suisse s’inscrit dans cette même logique en adoptant un dispositif relatif aux questions de droits processuels et substantiels. L’article 139.a de la loi fédérale d’organisation judiciaire part du postulat de l’existence d’un arrêt de la cour constatant la violation ou d’une décision du Comité des Ministres sur la base de l’article 33 de la convention pour préconiser l’ouverture de la révision dans les cas où la réparation ne pourrait être obtenue par une autre voie.

Mais, il faut retenir que la situation Européenne, bien que tendant à harmoniser les pratiques étatiques, se heurte toujours à une forme de résistance. Cette résistance est plus accentuées dans les cadres africains, interaméricain et Onusien.

 

B)        De la persistance du bouclier étatique

Quelle relève d’une dimension structurelle ou conjoncturelle, la dynamique de suivi des décisions préconisant des mesures de restitutio in integrum se heurte toujours à la souveraineté des Etats. Ce fait est d’autant plus constant que même dans le cadre Européen, certains Etats ne suivent pas parfaitement les orientations du Comité des Ministres. Ainsi, l’article 89 de la loi française du 15 juin 2000 adopte un dispositif de réexamen limité aux seules condamnations pénales et subordonné à l’absence de satisfaction équitable. 

Mais il faut préciser que les contentieux africain, interaméricain et Onusien souffrent le plus de l’attitude des Etats suite à un constat de violation aboutissant à des mesures de restitutio in integrum. Ces trois derniers systèmes partagent la faiblesse découlant de l’absence d’un mécanisme de suivi à la fois autonome et distinct des organes de jugement. En effet, le Comité des Droits de l’Homme et la Commission Africaine vont jusqu'à demander à l’Etat défendeur de leur rendre compte des mesures prises pour donner effet à leurs décisions. Alors que dans le cadre interaméricain, le Président Antonio Augusto Cançado Trinidade a fait remarqué que « seuls trois Etats de la région s’appuient actuellement sur des procédures de droit interne pour garantir l’exécution des arrêts de la Cour Interaméricaine »[37].

En définitive, les mesures de restitutio in integrum, pour être efficace, nécessitent que l’obligation des Etats à se conformer aux décisions constatant la violation repose sur un dispositif interne approprié. Ceci reste un préalable fondamental à leur faisabilité .

 

Conclusion

L’analyse du contentieux international des droits de l’Homme révèle l’existence d’une politique jurisprudentielle articulée autour de la primauté de la restitutio in integrum par rapport aux autres modalités de réparation. La valeur primordiale de la restitutio in integrum reste théoriquement incontestable au regard du dispositif normatif de protection des droits de l’Homme et des attendus des décisions du juge international.

Ainsi, le juge interaméricain se bornera à ordonner des mesures de restauration du statu quo ante sans même en apprécier la faisabilité. Alors que son homologue de Strasbourg adopte une démarche pragmatique se fondant sur une interprétation restrictive de l’article 41 de la Convention Européenne. Une différence de degré apparaîtra très vite quant à l’étendue des pouvoirs du juge dans l’application du principe de restitutio in integrum. au « minimalisme » Européen s’ajoutera un « maximalisme » incarné par la Cour Interaméricaine et intégrant dans une moindre mesure les pratiques du Comité des Droits de l’Homme de l’ONU et de la  Commission Africaine.

Cependant, la restitutio in integrum se heurte à des obstacles liés à l’étroitesse de son champ d’application et sa réalisation effective dans l’ordre interne. Il découle de ce constat que le contentieux indemnitaire restera prépondérant dans la pratique. La politique jurisprudentielle dégagée par le juge et guidée par la primauté de la restitutio in integrum est confrontée à l’absence de moyens adéquats et appropriés. Elle repose en large partie sur une aspiration qui tarde à se réaliser concrètement. Et la ligne amorcée par le système Européen en ce qui concerne l’obligation de réexamen suite à des arrêts rendus par la cour doit se généraliser dans le contentieux international des droits de l’Homme, afin que la restitutio in integrum puisse réellement affirmer sa primauté. La capitalisation du mécanisme Européen de suivi des arrêts de la cour, sa modélisation et son appropriation dans le contentieux international pourrait aussi favoriser l’effectivité du principe de restitutio in integrum. Seulement, il faudra éviter de tomber sur les failles du modèle Européen qui permet au Comité des Ministre de porter son appréciation sur les mesures prises au titre de la restitutio in integrum alors même que l’affaire reste pendante devant la cour. Cette concurrence est d’autant plus préoccupante que le comité reste un organe politique dont l’intervention aux fins de suivi dans les procédures contentieuses doit se placer en aval. Il s’agit d’un contrôle à posteriori. Encore faudrait-il que la Cour de Strasbourg sorte de son mutisme pour ordonner, comme le juge interaméricain, des mesures de restitutio in integrum.

Enfin, il faut préciser que les mesures de restitutio in integrum, pour être efficaces, doivent être ordonnées en connaissance de cause. Le juge ne peut se borner de façon systématique à ordonner cette modalité de réparation en ignorant parfaitement la situation interne de l’Etat défendeur. Il doit se doter de moyens d’évaluation efficaces car la remise des choses au statu quo ante dépend fondamentalement du contexte interne de l’Etat. A cet effet, l’enquête et l’analyse seraient des outils appropriés et des paramètres d’appréciation incontournables que les conventions internationales devraient intégrer d’avantage.

 

 

 

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[1] Chérifou Gassama est chargé de programme pour le Sénégal de la Fondation Friedrich Naumann

[2] CPJI, affaire des usines de Chorzow, 13 septembre 1928, série A, n°17,P17

[3] Cour Européenne des Droit de l’Homme, Papamichalopoulos et autres contre Grèce, 31 Octobre 1995 (art 50), § 34,§38

[4] S. Ex. M. Gilbert Guillaume, la Cour Internationale de Justice et les Droit de l’Homme, Droits Fondamentaux, n°1 Juillet – Décembre 2001, www.revue-df.org

[5] Affaire Texaco Calasiatic, 19 janvier 1977, JDI. 1977, p350 – Arbitrage du professeur R.J.Dupuy

[6] Domicé ©, « Observation sur les droits de l’Etat victime d’un fait internationalement illicite », in Droit International 2. Institut des Hautes Etudes Internationales de Paris. Paris Pédone 1982 P15

[7] Conseil de l4europe, Droit de l’Homme en droit international, Texte de base, éd Conseil de l’Europe, mai 2002, p445

[8] CIJ, affaire de l’accord de siège Etats-Unis/ONU à propos du bureau de l’OLP à New-York, avis consultatif, 1988

[9] CIJ, affaire de la tutelle des mineurs, 1958

[10] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Affaire de Cubber contre le Royaume de Belgique, arrêt du 24 Août 1987, §21

[11] Coour Interaméricaine de Droits de l’Homme, Velazquez, Réparation, 21 Juillet 1989

[12] Cour Internationale de Justice, RDC C. Belgique, arrêt du 14 février 2002

[13] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Vogt c Allemagne, 26 septembre 1995, res DH (97) du 12 au 28 janvier 1997

[14] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Papamichalopoulos C. le Grèce, satisfaction équitable

[15] Inter-american Court of Human rights, Aloeboetoe et al. Case, Judgement of Septembre 10, 1993 § 44

[16] Comité des Droits de l’Homme communication n°488/1992, Nicolas Toonen C Australie, constatation du 31 Mars 1994, Rapport du comité des Droits de l’Homme de l’Assemblée générale, A/49/40 Vol. II, p.251, §10

[17] Comité dr.h communication n°63/1979, Violeta Setelich C Uruguay constatation du 28 octobre 1981.

[18] Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, 102/93 Constitutional Rights Project et Civil Liberties Organisation c/NIgeria

[19] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Affaire Ex-roi de Grèce et autres C Grèce, Arrêt sur la satisfaction équitable § 73, 28 Novembre 2002.

[20] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Affaire Ex-roi de Grèce etautres C Grèce, Satisfaction équitable, 28 novembre 2002

[21] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Affaire De Wilde, Ooms et Versyp c Belgique, Satisfaction équitable § 16,10 mars 1972

[22] Cour Interaméricaine des Droits del’homme, arrêt du 27 novembre 1998, Loayza Tamayo contre le Pérou, réparation § 84

[23] Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme, arrêt CASTILLO Petruzzi contre Pérou, 30 mai 1999.

[24] Philippe Frumer, la réparation des atteintes aux Droits de l’Homme internationalement protégé – Quelques données comparatives, RTDH, n°27 1er Juillet 1996

[25] Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme, affaire Velázquez, réparation 21 juillet 1989

[26] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Affaire Kinsley C Royaume-Unis, 7 novembre 2000 

[27] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Affaire De  Wilde, Ooms et Versyp C Belgique, 10 mars 1972

[28] Etude concernant le droit à restitution, à indemnisation et à réadaptation des victimes de violation flagrante des droits de l’homme et des libertés fondamentales, rapport final de Van Boven, E/CH4/SUB.2/1993/8, 2 juillet 1993 § 137.8

[29] Interamerican court of Human Rights, Aloeoboetoe et Al. case, judgement of September 10th, 1993 §49

[30] Sentence arbitrale du 1er novembre 1923, Affaire du Lusitania, R.S.A, Vol. VII, p34

[31] Flauss J.F, la banalisation du contentieux indemnitaire devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme, RTDH, n° 25,  1er janvier 1996

[32] Cour Européenne des Droits de l’Homme, Arrêt du 19 octobre 2000, Iatridis, §32

[33] Antonio Augusto Cançado Trindade, le développement du droit international des Droits de l’Homme à travers l’activité et la jurisprudence des Cours Européenne et Interaméricaine des Droits de l’Homme, Janvier 2004, http://www.echr.coe.int/fr/discours/cancado Trindaddiscours.htm

[34] Gérard Cohen-Jonathan, Les lignes de force de l’évolution du droit de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et du contrôle de son application, Revue québecquoise de droit international, 2000

[35] Cour Européenne des Droits de l ‘Homme, Scozzari & Giunta c. Italie, 13 juillet  2000

[36] Comité des Ministres, Recommandation n°R (2000) 2 sur le réexamen ou la réouverture de certaines affaires au niveau interne suite à des arrêts de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, 19 janvier 2000-694ème réunion de Déléguées des Ministres

[37] Antônio Cançado Trinidade, Audience solennelle de la Cour Européenne des Droits de l’Homme à l’occasion de l’ouverture de l’année judiciaire, 22 janvier 2004, http://www.echr.coe.int/fr/discours/cancado Trindaddiscours.htm

 

 

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